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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 38e Législature,
Volume 142, Numéro 61

Le mardi 17 mai 2005
L'honorable Daniel Hays, Président


 

 

LE SÉNAT

Le mardi 17 mai 2005

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de passer aux déclarations de sénateurs, je vous signale la présence à notre tribune de Son Excellence M. Saleh Abdullah Bin Hemeid, président du Conseil de la Choura du Royaume d'Arabie saoudite. Il est accompagné de sept membres du Majlis al-choura et de l'ambassadeur de l'Arabie saoudite au Canada, Mohammed Al-Hussaini.

Nous vous souhaitons la bienvenue au Sénat du Canada.


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

SA MAJESTÉ LA REINE ELIZABETH II
SON ALTESSE ROYALE LE PRINCE PHILIP, DUC D'ÉDIMBOURG

BIENVENUE AU CANADA

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, au nom du Sénat du Canada, je suis heureux de souhaiter la bienvenue au Canada à Sa Majesté la reine Elizabeth II et Son Altesse Royale le prince Philip, duc d'Édimbourg.

Le couple royal arrivera à Regina, en Saskatchewan, cet après-midi où il sera accueilli par le premier ministre Paul Martin et son épouse. Le couple royal parcourra la Saskatchewan et l'Alberta du 17 au 25 mai en vue de participer aux célébrations du centenaire de l'entrée de ces deux provinces dans la Confédération canadienne. C'est la troisième visite de Sa Majesté et du prince Philip en Saskatchewan et en Alberta. Ils avaient déjà visité ces deux provinces en 1973 et en 1977.

En tant que premier dominion de l'Empire britannique et premier pays à se joindre au Commonwealth en 1867, le Canada a eu la grande chance de profiter des traditions de la monarchie britannique. L'histoire du Canada a évolué sous l'égide de la monarchie britannique qui nous a légué un cadeau d'une valeur inestimable, le modèle parlementaire de Westminster, qui est peut-être la forme de gouvernement la plus efficace au chapitre de la démocratie et des débats respectueux.

La reine a assisté aux célébrations marquant le centenaire de l'entrée dans la Confédération du Manitoba, de la Colombie-Britannique et de l'Île-du-Prince-Édouard, ainsi que le centenaire des Territoires du Nord-Ouest. Elle était encore la princesse Elizabeth lorsqu'elle est venue avec le prince Philip pour la première fois au Canada en octobre 1951 et elle est revenue ici à plus de 20 reprises depuis. Elle a présidé la cérémonie d'ouverture de la Voie maritime du Saint-Laurent, la cérémonie de rapatriement de notre Constitution et celle marquant la création du Nunavut.

L'intérêt qu'elle porte à notre pays est partagé par d'autres membres de la famille royale qui l'accompagnent ou qui participent de leur côté à d'importants événements culturels et historiques au Canada. Ainsi, du 31 mai au 8 juin, le prince Edward, comte de Wessex, sera également en visite au Canada.

Les Canadiens ont toujours tenu la reine en très haute estime du fait qu'elle s'est toujours préoccupée de notre bien-être et de notre prospérité. Nous avons avec cette monarchie des liens étroits qui ont été renforcés par les difficultés de la guerre qui ont touché nos deux pays et par les valeurs que nous avons en commun et qui font partie intégrante de notre nation. Il faut noter que le prince Philip était un membre actif des forces armées durant la Seconde Guerre mondiale. Le prince Charles et le prince Andrew ont une formation militaire et avec le prince Harry, la tradition se poursuit. C'est particulièrement important au moment où le Canada célèbre l'Année de l'ancien combattant.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, au nom de l'opposition au Sénat du Canada, je voudrais m'associer avec mes collègues aux paroles de bienvenue du leader du gouvernement au Sénat à l'égard de Sa Majesté et du prince Philip à l'occasion de leur visite au Canada.

Notre pays a la chance de pouvoir toujours compter sur Sa Majesté et d'autres membres de la famille royale qui sont prêts à montrer de façon si exemplaire ce que signifient le sens du devoir et le service public, tout cela dans la plus grande dignité.

Je sais que mes collègues à l'autre endroit, surtout les députés de la Saskatchewan et le chef de l'opposition officielle, seront eux aussi en Saskatchewan pour offrir un accueil plus personnel à Sa Majesté.

L'ATLANTIC INSTITUTE FOR MARKET STUDIES

FÉLICITATIONS POUR AVOIR OBTENU LE TEMPLETON FREEDOM AWARD FOR INSTITUTE EXCELLENCE

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, l'Atlantic Institute for Market Studies, AIMS, est un groupe de réflexion indépendant sur la politique sociale et économique, qui est établi à Halifax, en Nouvelle-Écosse. En tant qu'organisme sans but lucratif constitué en vertu d'une loi fédérale, il est financé par les contributions de particuliers, de sociétés, de fondations et d'autres organisations. AIMS, qui représente

une voix distincte venant du Canada atlantique, entreprend et effectue des recherches sur les nouvelles questions de politique publique et économique auxquelles sont confrontés les Canadiens de l'Atlantique et, en fait, tous les Canadiens.

Honorables sénateurs, l'AIMS célèbre son dixième anniversaire cette année. Il est approprié qu'il ait reçu à nouveau une reconnaissance internationale pour l'excellence de ses travaux, sous la forme du Templeton Freedom Award for Institute Excellence de 2005.

Le programme des Templeton Freedom Awards célèbre les travaux remarquables des meilleurs instituts de recherche à but non lucratif et leur contribution à l'étude des questions stratégiques. Plus de 200 centres d'études et de recherches de 67 pays sont admissibles aux prix Templeton et l'AIMS est le seul institut nord- américain qui soit honoré cette année.

Le prix s'accompagne d'une bourse de 10 000 $US et il a été remis à la fin d'avril à Miami, en Floride, pendant le forum sur la liberté de l'Atlas Economic Research Foundation. Ce forum est un événement annuel qui attire des leaders politiques et des intellectuels du monde entier.

Honorables sénateurs, je saisis cette occasion pour offrir mes sincères félicitations au président de l'AIMS, Brian Lee Crowley, ainsi qu'aux membres de son conseil d'administration, dont des Haligoniens distingués comme David Mann, George Cooper, Colin Dodds et Bill Mingo. Je suis persuadé que tous les sénateurs se joindront à moi pour célébrer le succès qui ne se dément pas, sur les scènes nationale et internationale, d'une voix importante du Canada atlantique.

(1410)

LES RELATIONS AVEC L'ARABIE SAOUDITE

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, je souhaite ajouter ma voix à celle du leader du gouvernement au Sénat pour souhaiter la bienvenue à Sa Majesté la reine Élizabeth II, reine du Canada, et au prince Philip. Je lui ai promis allégeance à 16 reprises. Je demeure très heureux de lui témoigner ma loyauté en répétant qu'elle est ici chez elle. J'espère que les Canadiens la traiteront comme elle le mérite.

J'ai été fait membre du Conseil privé de la Reine de sa main propre. Il y a peu de personnes au Sénat qui peuvent en dire autant. Cela dit, je lui souhaite un beau voyage et beaucoup de bonheur.

Plus tôt, Son Honneur a présenté la délégation saoudienne de la Choura et le Président du conseil de la Choura. Il s'agit d'une visite qu'ils nous rendent, après une longue attente, suite à un voyage en Arabie saoudite d'une délégation du Sénat, qui a eu lieu du 18 au 25 janvier 2001. Cette délégation était accompagnée de notre ancien Président, le bien-aimé Gildas Molgat.

J'ai eu l'honneur de visiter l'Arabie saoudite en 1993, en 2000 et en 2001. Je crois fermement que nous devons poursuivre le dialogue avec nos amis du monde entier, notamment avec l'Arabie saoudite. Nous devons leur communiquer nos propres expériences et non leur dire quoi faire.

J'ai été témoin des premiers pas de la Choura, en 1980, qui comptait alors 30 sièges. Elle n'a cessé de prendre de l'importance depuis. L'un de nos collègues se trouvait en Arabie saoudite récemment et il a comparé la Choura au Sénat. Il a précisé : « C'est incroyable, on dirait le Sénat du Canada. » En effet, c'est vrai, mais les différences sont tout de même nombreuses. Elles s'estomperont avec le temps.

Je souhaite souligner à nouveau que les membres de la Choura sont les bienvenus au Canada et au Parlement du Canada.

Je tiens maintenant à saluer le président du Conseil de la Choura afin que son nom figure dans les Débats du Sénat. Son Excellence Saleh Abdullah Bin Hemeid détient des titres universitaires éloquents et ses expériences professionnelles sont nombreuses et considérables. Il a participé à bien des conférences et des symposiums, et il y a notamment prononcé des allocutions, et il a publié différents travaux de recherche.

Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que j'accueille mon cher ami au Sénat. Je suis enchanté qu'il soit enfin venu nous rendre visite au Canada.

LA COLOMBIE-BRITANNIQUE

VANCOUVER—LE PROGRAMME DES ARTS DE LA ST. JAMES COMMUNITY SERVICES SOCIETY—
L'EXPOSITION DANS LE FOYER DU SÉNAT

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour vous parler de l'exposition « Moving Beyond our Challenges » que j'ai l'honneur de présenter, aujourd'hui et demain, dans le foyer du Sénat.

En qualité de présidente d'honneur de la St. James Community Services Society, j'ai pu observer moi-même les problèmes auxquels se butent bon nombre des artistes et des personnes auxquels la St. James Society vient en aide.

La St. James Society est un organisme du quartier est du centre- ville de Vancouver qui a pour but d'offrir un appui aux gens qui doivent composer avec de nombreux problèmes, notamment les maladies mentales comme la schizophrénie, tout en reconnaissant la nécessité d'aider les personnes qu'elle sert à prendre conscience de leur valeur en tant qu'être humain. Grâce au programme des arts, ces personnes peuvent surmonter leurs problèmes et s'exprimer par le biais des arts.

Honorables sénateurs, vous êtes tous convaincus, je le sais, qu'un peu de reconnaissance aide beaucoup les gens à surmonter leurs difficultés. Nous sommes tous confrontés à des difficultés, mais beaucoup, parmi les artistes qui sont représentés ici, ont surmonté et continuent de surmonter plus que leur part de difficultés.

Afin d'aider les honorables sénateurs à comprendre les difficultés dont il est question ici, je vais vous raconter l'histoire de Carmen. En 1998, elle a emménagé à Victory House, un foyer-refuge pouvant accueillir 48 résidants atteints de troubles mentaux chroniques. Elle vivait dans la rue et dormait dans des hôtels du quartier est du centre-ville, le quartier le plus malfamé de Vancouver. Souffrant de schizophrénie, Carmen se négligeait, elle était agressive, refusait de prendre ses médicaments et poussait des cris la nuit. Son comportement lui a valu d'être fréquemment expulsée des résidences où elle habitait.

Au début de son séjour à Victory House, Carmen vivait dans la rue le jour et, pour ses repas, joignait les files d'attente où on distribue de la nourriture. Elle refusait de prendre ses médicaments et avait un comportement asocial. Il a fallu environ deux ans pour établir graduellement une relation avec elle et l'amener à faire confiance à quelqu'un.

Aujourd'hui, Carmen mange trois repas par jour, elle fait partie de la troupe de théâtre St. James et s'assoit au salon pour y observer les gens.

Le plus encourageant, c'est que Carmen a commencé à peindre. Grâce à des fonds recueillis par la troupe St. James, on a pu acheter des toiles et des peintures pour Carmen et pour d'autres artistes. Elle s'est d'abord exprimée par son art, puis verbalement au contact d'autres personnes.

Carmen peint des toiles étonnantes. Ses paysages illustrent des châteaux, des champs de blé de la Saskatchewan et des lagons de Polynésie. Elle sait rendre de merveilleuses intuitions et images que seule une personne schizophrène peut évoquer. Il est merveilleux qu'elle puisse exprimer ces images sur des toiles.

Carmen et les artistes de St. James sont un exemple pour nous tous. J'invite les sénateurs à venir voir leurs oeuvres étonnantes à l'exposition. Les honorables sénateurs pourront également y rencontrer Sandra Smith, l'une des artistes de St. James, qui est aujourd'hui dans la tribune en compagnie de Jan Volker et Erin McNeil, qui représentent la société des services communautaires de St. James.

Je suis heureuse non seulement de pouvoir partager ces magnifiques oeuvres d'art avec mes collègues ici même, mais aussi d'accueillir ces artistes et le public canadien dans notre magnifique institution.

Je remercie également l'huissier du bâton noir, Terrence Christopher, qui, par son aide précieuse, a rendu cet événement possible.

[Français]

LE KOWEÏT

DROIT DE VOTE ACCORDÉ AUX FEMMES

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, je prendrai quelques instants pour attirer votre attention sur une nouvelle qui m'a plu ce matin dans le journal. La semaine dernière, lorsque je vous ai parlé de l'Objectif no 3 du millénaire et de l'importance des femmes en politique, j'ai mentionné qu'il y avait encore trois pays sur la terre où les femmes n'avaient pas le droit de vote ni celui de se porter candidates.

Ce matin, il me fait plaisir de réviser ce que je vous ai dit parce que le parlement d'un de ces trois pays a approuvé hier, le 16 mai, une loi permettant aux femmes de ce pays de voter et de briguer un siège à une élection. Ce pays, honorables sénateurs, c'est le Koweït. En 2007, lors des prochaines élections législatives prévues dans ce pays, nous verrons, pour la première fois, des femmes sur la scène politique. Il y aura une condition : ces femmes seront obligées de respecter la loi islamique. Le Coran pouvant être interprété comme accordant déjà une juste place aux femmes, je suis confiante que cette obligation n'empêchera en rien les femmes du Koweït d'occuper leur place sur l'échiquier politique de leur pays. Après tout, ces femmes occupent déjà des postes très élevés dans l'industrie pétrolière, l'éducation et la diplomatie.

Honorables sénateurs, la communauté internationale de parlementaires dont nous faisons partie peut se féliciter de contribuer ainsi à l'évolution des mentalités et à la proclamation de la démocratie à l'échelle de la planète.

[Traduction]

LE REGRETTÉ JUGE ALAN B. GOLD, C.R.

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, ce matin, des funérailles ont eu lieu à Montréal à la mémoire d'un homme vraiment extraordinaire, le juge Alan B. Gold.

[Français]

Le juge Gold est né en 1917 à Montréal. On n'aurait jamais cru qu'il était si âgé parce qu'il était tellement fort et plein de vigueur jusqu'à la fin de sa vie. Il a fait ses études en droit à l'Université de Montréal, bien qu'anglophone, et il s'est spécialisé dans les relations de travail en plus d'enseigner à l'Université McGill.

[Traduction]

Il est devenu un avocat renommé et respecté, connu de tous comme le juge Gold, car il a été juge en chef de la Cour supérieure du Québec de 1983 à 1992. Au cours de cette période, il a accompli un travail herculéen pour réduire les retards et les arriérés qui assaillaient cette cour. Il savait que justice différée est justice refusée.

Cependant, il a connu la plus grande renommée comme arbitre et médiateur dans les relations de travail dans la fonction publique du Québec, dans le port de Montréal, à la société des postes, dans les grèves des sociétés ferroviaires et aussi dans les grandes affaires publiques qui allaient au-delà des relations de travail. Je songe notamment au différend à Oka et à l'affaire des bulletins de vote annulés, à la suite du dernier référendum au Québec. Il a été président de l'Université McGill, chancelier de l'Université Concordia et gouverneur associé de l'Université de Montréal, ce qui témoigne en partie de son dévouement pour la cause des études supérieures, comme pour bien d'autres causes.

(1420)

Notre famille l'a connu lorsque nos enfants et quelques-uns de ses petits-enfants se sont liés d'amitié. Grâce à ces liens, notre famille a assisté pendant quelques années aux mêmes célébrations du seder et autres célébrations religieuses que la famille Gold. À ces occasions, j'ai pris conscience de son extrême intelligence et de sa compréhension et de son amour profonds du droit et de la nature humaine, ainsi que du fonctionnement de nos sociétés. Il était un homme très chaleureux et doté d'un esprit empreint d'ironie, qualités qu'il partageait avec sa femme, Lynn.

Les sénateurs se joindront sûrement à moi pour exprimer leurs condoléances à Lynn et à toute sa famille. Le Canada a perdu un grand citoyen lors du décès du juge Gold.


AFFAIRES COURANTES

LA LOI DE 1994 SUR LA CONVENTION CONCERNANT LES OISEAUX MIGRATEURS
LA LOI CANADIENNE SUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT (1999)

PROJET DE LOI MODIFICATIF—RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Tommy Banks, président du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, présente le rapport suivant :

Le mardi 17 mai 2005

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles a l'honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre Comité auquel a été déféré le Projet de loi C-15, Loi modifiant la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs et la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999), a, conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 2 février 2005, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement, mais avec des observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
TOMMY BANKS

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, à la page 913.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Banks, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

L'ÉTUDE DE QUESTIONS RELATIVES À DES OBLIGATIONS NATIONALES ET INTERNATIONALES

DÉPÔT DU RAPPORT INTÉRIMAIRE DU COMITÉ DES DROITS DE LA PERSONNE

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le dix- huitième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. Il s'agit d'un rapport intérimaire intitulé Adhésion du Canada à la Convention américaine relative aux droits de l'Homme : Le temps est venu de passer à l'action.

(Sur la motion du sénateur Andreychuk, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

L'ASSOCIATION PARLEMENTAIRE CANADA-AFRIQUE

TROISIÈME SESSION DU PARLEMENT PANAFRICAIN TENUE DU 29 MARS AU 1ER AVRIL 2005—DÉPÔT DU RAPPORT

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 23(6) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation canadienne de l'Association parlementaire Canada- Afrique, à l'occasion de sa visite en Afrique du Sud pour la troisième session du Parlement panafricain, qui s'est tenue à Midrand, en Afrique du Sud, du 29 mars au 1er avril 2005.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LES FINANCES

LES MODIFICATIONS AU BUDGET 2005—LE NOUVEAU- BRUNSWICK—
L'INCIDENCE DE LA REMISE À NEUF DE LA CENTRALE NUCLÉAIRE DE POINTE LEPREAU

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. La fin de semaine dernière, j'ai lu dans le journal un article dans lequel le ministre des Finances, l'honorable Ralph Goodale, présentait un bilan des coûts liés aux mesures gouvernementales annoncées depuis le discours du budget. Essentiellement, si l'on tient compte des mesures budgétaires du NPD, il resterait exactement 2 milliards de dollars à consacrer à la réduction de la dette pour l'exercice en cours et exactement 2 milliards de dollars aussi pour le prochain exercice. Or, comme condition à l'acceptation des dépenses du NPD, c'est ce montant précisément qui devait être disponible à tout le moins à la fin de l'exercice.

Le leader du gouvernement peut-il confirmer que, selon les conditions de l'entente conclue avec le NPD, si de nouvelles mesures sont annoncées d'ici là, le gouvernement ne sera pas en mesure de respecter les engagements qu'il a pris envers M. Layton?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je ne suis pas en mesure de le confirmer. En vertu des arrangements prévus dans le projet de loi C-48, qui a été déposé à l'autre endroit, il est clair que le gouvernement n'est pas prêt à se mettre en déficit pour appliquer les dispositions de ce projet de loi. Le gouvernement maintiendra son fonds de prévoyance et toute somme supplémentaire sera consacrée aux dispositions du projet de loi C-48.

Le sénateur Oliver : Dans son édition du 4 mai 2005, le Moncton Times and Transcript publiait un article dans lequel on pouvait lire ceci :

En raison de l'entente de 4,6 milliards de dollars conclue avec le NPD concernant le budget, il sera plus difficile pour le gouvernement fédéral de dégager les sommes nécessaires pour aider le Nouveau-Brunswick à moderniser la seule centrale nucléaire du Canada atlantique, affirme le ministre des Finances, Ralph Goodale.

L'argent pour l'entente conclue avec le NPD proviendra probablement des quelque 9 milliards de dollars que le gouvernement fédéral a mis de côté, comme fonds de prévoyance pour les deux prochaines années. C'est ce même argent que le ministre des Finances disait réserver à un éventuel programme d'aide financière destiné à la province.

Le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous dire si l'affirmation du ministre des Finances est exacte? L'entente conclue avec le NPD a-t-elle compromis toute contribution fédérale au projet de modernisation de la centrale nucléaire de Pointe Lepreau?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je ne pense pas que la contribution proposée à la modernisation de la centrale de Pointe Lepreau et que les arrangements prévus au projet de loi C-48 soient liés.

Comme les honorables sénateurs le savent déjà, les questions touchant à la production d'électricité dans les provinces relèvent exclusivement de la compétence de ces dernières et non de celle du gouvernement fédéral. Néanmoins, le gouvernement du Canada est prêt à discuter du rôle qu'Énergie atomique du Canada limitée pourrait jouer à Pointe Lepreau, qui utilise sa technologie. Si cette entente technologie peut être conclue, alors la participation du fédéral au projet de modernisation pourra être envisagée. Toutefois, la mise en oeuvre de ce projet tarde parce que les parties n'arrivent pas à s'entendre sur les responsabilités financières.

(1430)

ÉNERGIE ATOMIQUE DU CANADA LIMITÉE

LA COMMERCIALISATION DE LA TECHNOLOGIE NUCLÉAIRE

L'honorable Noël A. Kinsella (leader de l'opposition ) : Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire à poser. La centrale nucléaire de Pointe Lepreau est équipée d'un réacteur CANDU. Le gouvernement du Canada envisage-t-il de recourir à une technologie de pointe pour remettre à neuf la centrale de Pointe Lepreau, si une telle technologie peut être utile dans ce cas, et pour effectuer l'incontournable remise à neuf des réacteurs CANDU de même que pour promouvoir la vente à l'étranger de réacteurs CANDU de dernière génération?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Je pourrais brièvement répondre à la question de mon honorable collègue en lui disant oui, mais cela mérite quelque explication. Énergie atomique du Canada voudrait mettre en service de nouvelles technologies et l'agence a d'ailleurs pris langue avec la province du Nouveau- Brunswick et d'autres pays à cet égard. L'une des questions qui se pose consiste à savoir qui va assumer les risques inhérents à la démonstration de cette nouvelle technologie? Il serait moins coûteux pour la province du Nouveau-Brunswick de remettre à neuf la centrale de Pointe Lepreau en recourant à une technologie CANDU standard, davantage traditionnelle.

Malheureusement, je ne puis vous donner plus de précisions sur les négociations en cours.

Le sénateur Kinsella : Honorables sénateurs, je suis sûr que le ministre sera d'accord avec moi, et je l'invite d'ailleurs à me faire part de ses remarques. Par delà la synergie qui existe entre Énergie atomique, le milieu de la recherche et les programmes de remise à neuf des différents réacteurs CANDU au Canada, il conviendrait, au nom de l'intérêt national, d'intégrer les plus récentes positions environnementales relativement aux énergies propres, aux nouvelles technologies de traitement des déchets nucléaires et, de façon générale, aux progrès très importants dont la technologie du nucléaire a bénéficié. En effet, d'énormes progrès ont été réalisés par rapport à l'époque de la mise en service des réacteurs CANDU, soit ceux de l'Ontario et celui de Pointe Lepreau. Nous devons avoir la garantie qu'Énergie atomique applique une approche globale qui tienne compte des aspects associés à la politique environnementale, de même que des questions de financement, et de recherche et développement.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je suis en général d'accord avec le sénateur Kinsella. Récemment, nous avons constaté que les producteurs d'énergie et les environnementalistes s'entendent généralement sur le rôle important à accorder au nucléaire. Plus ce genre d'entente se confirmera, comme je l'espère, et plus le Canada sera en mesure de développer la nouvelle génération des réacteurs CANDU.

Comme nous le savons, l'énergie nucléaire ne pollue pas l'atmosphère; elle ne pollue pas l'environnement. Le principal problème de la production d'électricité par le nucléaire est constitué par l'élimination des combustibles épuisés. Or, le Canada est assis sur de vastes étendues du bouclier précambrien, formation qui n'a pas bougé en 4 milliards d'années et dans laquelle nous pourrions sans doute aménager des dépôts souterrains très sûrs pour ce genre de déchets.

Je me dois de souligner l'importante différence de responsabilités qui existe dans ce domaine entre le palier fédéral et le palier provincial. Les provinces sont chargées de produire et de distribuer l'électricité entre elles et elles ont aussi la possibilité d'écouler l'énergie qu'elles produisent sur d'autres marchés.

Le gouvernement fédéral, quant à lui, a commencé à investir il y a très longtemps dans l'énergie nucléaire. Le Canada a acquis une formidable compétence dans ce domaine depuis qu'il est devenu une puissance nucléaire, c'est-à-dire depuis qu'il dispose de la technologie voulue pour produire de l'énergie et pour fabriquer des bombes atomiques. EACL est en train de travailler sur ce qu'elle appelle un projet vert qui est, semble-t-il, extrêmement prometteur.

Je pense que le sénateur Kinsella sera d'accord avec moi pour dire que le Canada doit confirmer sa place, sur la scène internationale, de pays apte à exploiter l'énergie nucléaire à des fins civiles, comme la production d'électricité. J'espère que les négociations avec le Nouveau-Brunswick permettront au projet de Pointe Lepreau d'aboutir.

LE NOUVEAU-BRUNSWICK—
LES CONDITIONS FINANCIÈRES DE LA REMISE À NEUF DE LA CENTRALE NUCLÉAIRE DE POINTE LEPREAU

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, je suis loin d'être aussi bien renseigné que les deux leaders sur l'aspect technique de ces négociations, mais leur aspect financier m'intéresse beaucoup. Puisqu'il était sous-ministre de l'Énergie à l'époque où le Nouveau- Brunswick a pris le virage du nucléaire, le leader du gouvernement se souviendra que le gouvernement fédéral avait prêté à la province la moitié de l'argent nécessaire à la construction de Pointe Lepreau.

Avant cela, lorsque l'Ontario et le Québec s'étaient engagés dans l'industrie électronucléaire, le gouvernement fédéral s'était montré extrêmement généreux, encore plus qu'il ne l'a été ensuite à l'égard du Nouveau-Brunswick, les encourageant, pour des raisons évidentes, à s'engager dans cette voie. Le ministre se rappelle également que ces dernières années, le gouvernement Chrétien a offert des conditions extraordinairement généreuses à la Chine pour l'inciter à acheter le réacteur CANDU.

Je voudrais connaître les conditions financières qu'offre le gouvernement fédéral au Nouveau-Brunswick. Sont-elles au moins aussi généreuses que celles qu'il est prêt à consentir à des pays étrangers?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, de toute évidence, je ne peux pas dévoiler la nature des négociations financières concernant la remise à neuf de Pointe Lepreau, ni même la vente de la technologie CANDU. Il s'agit de négociations touchant la propriété et le commerce.

Le sénateur Murray a parfaitement raison de dire que le gouvernement fédéral de l'époque avait consenti à l'Ontario de belles conditions financières pour l'inciter à devenir le premier utilisateur de la technologie CANDU. Je pense que cela correspond à la pratique commerciale habituelle.

Dans le cas de la Chine, le Canada a supervisé avec succès la construction et le fonctionnement de deux réacteurs CANDU de 600 mégawatts près de Shanghai. Comme ce projet a été exécuté dans le respect des délais et du budget, le Canada a pu discuter avec la Chine d'autres achats.

Le Canada avait consenti un prêt de 1,5 milliard de dollars, qui, selon les dispositions, est en voie d'être remboursé et devrait l'être complètement. Il n'y a aucun financement sous forme de subvention ou de concession.

Honorables sénateurs, rien de cela n'a une incidence directe sur Pointe Lepreau, mais je peux garantir qu'en plus d'un intérêt durable pour l'énergie nucléaire, je souhaite qu'il y ait une entente entre le Nouveau-Brunswick, Énergie atomique du Canada limitée et le gouvernement du Canada en vue de la remise à neuf et en service de la centrale de Pointe Lepreau.

Le sénateur Murray : Le ministre ne veut pas dévoiler ce que le gouvernement fédéral offre au Nouveau-Brunswick, mais accepterait-il de nous dire ce que le Nouveau-Brunswick demande au gouvernement fédéral?

(1440)

Le sénateur Austin : Non, honorables sénateurs, il s'agit du même aspect d'un même dossier.

[Français]

LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL

L'ENTENTE SUR LE PROGRAMME DE SERVICES DE GARDE AU NOUVEAU-BRUNSWICK

L'honorable Pierrette Ringuette : Honorables sénateurs, ma question porte sur l'annonce que le premier ministre Lord a faite d'annuler la rencontre pour signer une entente sur le nouveau programme de services de garde d'enfants du Nouveau-Brunswick.

La population du nord-ouest du Nouveau-Brunswick, que j'ai rencontrée la fin de semaine dernière, est scandalisée qu'on ait mis sur le même pied un programme nucléaire et un programme destiné aux soins et à la garde des enfants. De plus, le premier ministre a aussi indiqué qu'il mettait encore sur le même pied d'égalité l' Entente de transfert de la taxe fédérale sur l'essence aux municipalités.

Est-ce que le leader du gouvernement au Sénat peut me confirmer que le premier ministre va poursuivre les discussions avec les autorités du Nouveau-Brunswick pour faire en sorte que les enfants du Nouveau-Brunswick aient les mêmes bénéfices que les enfants des autres provinces face aux subventions fédérales?

[Traduction]

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je voudrais dire très clairement que le gouvernement du Canada n'a pas de plus grande priorité que de conclure un accord sur les garderies avec le Nouveau-Brunswick, comme il l'a fait avec Terre-Neuve-et-Labrador, la Nouvelle-Écosse et d'autres provinces.

Le projet de loi C-43 d'exécution du budget, qui est à l'autre endroit, comporte l'engagement précis de financer, à concurrence de 5 milliards de dollars, la première étape du programme de garde d'enfants. Honorables sénateurs, je sais que tous les membres du Sénat souhaitent l'adoption du budget.

LES FINANCES

LES MODIFICATIONS AU BUDGET DE 2005—LES EFFETS SUR LE QUÉBEC

L'honorable Marcel Prud'homme : Si, par chance, nous n'avions pas d'élections, est-ce que le leader du gouvernement peut nous donner l'assurance, compte tenu du rythme auquel ces programmes sont annoncés et le fait qu'il faudra les mettre en oeuvre, qu'il restera suffisamment d'argent dans les caisses pour réaliser des programmes dans la province de Québec?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je ne pense pas que la province de Québec ait des raisons de s'inquiéter.

LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA

LA SASKATCHEWAN—LES CONTRIBUTIONS DU PARTI LIBÉRAL FÉDÉRAL AU PARTI LIBÉRAL PROVINCIAL

L'honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, une somme de près de 93 000 $ en dons anonymes du Parti libéral du Canada s'est retrouvée dans les coffres du Parti libéral provincial de la Saskatchewan. Le leader du gouvernement au Sénat conviendra-t- il que ces dons constituent une violation de la Loi électorale du Canada?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Je ne sais absolument pas si l'affirmation du sénateur Tkachuk est exacte.

Le sénateur Tkachuk : Le Parti libéral de la Saskatchewan utilise-t-il le Parti libéral du Canada pour éviter d'avoir à dévoiler les noms des donateurs?

Le sénateur Austin : Je n'ai absolument aucune idée de ce dont le sénateur Tkachuk parle.

Le sénateur Tkachuk : Je ne peux pas en vouloir au leader du gouvernement de ne pas lire les journaux de ma province, mais ce ne sont pas là des nouvelles très récentes. Cette question a été soulevée par les députés de l'Assemblée législative de la Saskatchewan. Je demande au leader du gouvernement de s'informer à ce sujet et, en particulier, de déterminer s'il y a violation de la Loi électorale du Canada.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je vais plutôt laisser les recours normaux en cas de violation alléguée de la Loi électorale du Canada suivre leur cours.

Je profite de l'occasion pour annoncer au Sénat que j'ai l'honneur d'avoir été désigné par le premier ministre comme ministre délégué auprès de Sa Majesté, au cours de la visite qu'elle effectuera à Regina et Saskatoon, les 18 et 19 mai. En effet, le ministre délégué désigné précédemment, l'honorable Ralph Goodale, est obligé de rester à Ottawa à cause du vote de confiance du 19 mai.

Le sénateur Tkachuk : Le leader du gouvernement a soulevé la question de la reine. Je me demande si les sénateurs de ce côté-ci qui iront voir la reine — je n'en suis pas — auront la possibilité de profiter du transport, ou est-ce que le leader du gouvernement voyagera sur Air Canada?

Le sénateur Austin : Oui, je voyage sur Air Canada. Le vol à destination de Toronto est à 7 heures, puis je partirai de Toronto à destination de Regina à 9 heures. Je serais heureux de faire le voyage en compagnie du sénateur Tkachuk.

L'honorable Gerry St. Germain : Je serais absolument choqué si le leader du gouvernement se faisait accompagner d'un membre de l'opposition, mais ce serait un bon signe.

Le sénateur Austin : Ce n'est pas n'importe qui.

Le sénateur Tkachuk : Non, ce n'est pas n'importe qui.

Le sénateur Kinsella : Ce qui est choquant, c'est qu'ils détroussent les Canadiens depuis trop longtemps.

L'AGRICULTURE ET L'AGROALIMENTAIRE

LES PROBLÈMES DES AGRICULTEURS

L'honorable Gerry St. Germain : Hier, l'Association des propriétaires terriens de Lanark a organisé une manifestation sur la Colline du Parlement afin d'attirer l'attention sur le sort des agriculteurs et des Canadiens dans les régions rurales. De toute évidence, cette manifestation est un autre signe de la frustration que de nombreux agriculteurs canadiens ressentent face à la conjoncture actuelle et aux politiques du gouvernement. Est-ce que le leader du gouvernement au Sénat peut nous indiquer si le gouvernement prévoit prendre d'autres mesures pour s'attaquer concrètement, dans l'immédiat, aux problèmes avec lesquels les agriculteurs canadiens doivent composer en rapport avec l'économie rurale? Il ne fait nul doute que ces gens réagissent ainsi parce qu'ils ont besoin d'aide.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, le problème le plus facile à saisir parmi ceux que vivent les agriculteurs est celui de la dégringolade du revenu agricole. Nous avons été témoins de pertes de milliards de dollars dans l'industrie céréalière et dans le secteur de l'élevage bovin.

Le gouvernement, comme le sénateur St. Germain l'a laissé entendre, a appuyé l'industrie agricole en injectant pratiquement 3 milliards de dollars afin de compenser les pertes qui ont été subies en raison du caractère cyclique de cette industrie.

Je profite de l'occasion, puisque le sénateur m'a déjà posé une question à ce sujet, pour dire que, en ce qui a trait à la maladie de la vache folle et à l'action intentée par le groupe américain R-CALF devant un tribunal du Montana, l'audience est prévue pour juillet 2005. Le gouvernement du Canada et les représentants du secteur de l'élevage bovin savent maintenant que bien que le département de l'Agriculture des États-Unis appuie l'ouverture sans réserve de la frontière aux bovins sur pied de 30 mois et moins, le processus judiciaire pourrait prendre jusqu'à deux ans avant qu'on en arrive à un règlement.

Les sénateurs conviendront que, pour le secteur de l'élevage bovin et d'autres secteurs, le gouvernement du Canada devra offrir une aide supplémentaire en raison du temps qu'il faudra pour en arriver à une solution.

L'ENCÉPHALOPATHIE SPONGIFORME BOVINE—
L'AIDE AU SECTEUR DE L'ÉLEVAGE BOVIN—L'ABATTAGE DES BÊTES ÂGÉES

L'honorable Gerry St. Germain : Le leader du gouvernement m'a coupé l'herbe sous les pieds en répondant à ma question supplémentaire avant que je ne la pose. Le premier ministre Ralph Klein a avancé que, en raison du litige intenté par les grands éleveurs protectionnistes des États-Unis, la frontière demeurera fermée pendant encore deux ans. C'est ce qu'il a dit.

La suggestion qui a été avancée par mon parti, tant ici qu'à l'autre endroit, consiste à rationaliser le troupeau en éliminant les bêtes âgées. En ce qui me concerne, il s'agirait d'une mesure importante qui servirait à désamorcer l'attitude belliqueuse du groupe R-CALF à l'égard de nos envois de bovins aux États-Unis, car on éliminerait ainsi pratiquement le risque qu'il y ait des bovins atteints de l'encéphalopathie spongiforme bovine au Canada. Est-ce qu'on se penchera plus en profondeur sur cet aspect du secteur de l'élevage bovin?

(1450)

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Je garantis au sénateur St. Germain que je n'avais pas vu sa question du jour, mais je m'attendais à ce qu'il la soulève, parce que c'est son thème de prédilection. Si j'ai répondu ainsi, c'est évidemment parce que, si nous attendons deux autres années pour résoudre cette question, nous nous retrouverons avec un cheptel de bovins de plus de 30 mois qui aura encore augmenté. Cette question est désormais au cœur des discussions entre le gouvernement et le secteur de l'élevage bovin.

Les honorables sénateurs doivent savoir que R-CALF tente également de faire fermer la frontière aux coupes désossées provenant d'animaux de moins de 30 mois. L'organisation vient en effet d'ajouter cette requête à l'action dont a été saisi le juge Richard Cebull, au Montana. On me dit que nous avons maintenu environ 60 p. 100 de nos niveaux antérieurs d'exportation grâce aux coupes désossées provenant d'animaux de moins de 30 mois. Si ce marché nous était interdit à cause d'une décision de la justice américaine, notre industrie serait dévastée et nous serions plongés dans une crise économique d'envergure.

LE COMMERCE INTERNATIONAL

L'ENCÉPHALOPATHIE SPONGIFORME BOVINE—LA FERMETURE DE LA FRONTIÈRE AMÉRICAINE AU BOEUF CANADIEN—
LE STATUT D'INTERVENANT DANS UNE CAUSE DEVANT UN TRIBUNAL DU MONTANA

L'honorable Gerry St. Germain : Est-il normal que le gouvernement du Canada intervienne dans une cause judiciaire? Est-ce la position que nous avons adoptée ou allons-nous simplement laisser la procédure judiciaire suivre son cours, sans intervenir?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Nous avons demandé le statut d'amicus curiae — c'est-à-dire d'ami de la cour — mais il nous a été refusé. Comme le sénateur St. Germain le disait, il n'est pas normal qu'un gouvernement intervienne dans une cause de ce genre où toutes les parties sont américaines. Il n'est pas normal, dans des causes de ce genre, que le gouvernement du Canada ou un gouvernement étranger ait à se soumettre à un contre-interrogatoire et à produire des documents. La cause dont a été saisi ce tribunal du Montana concerne exclusivement le département américain de l'Agriculture, qui veut maintenir sa règle, et l'organisation R- CALF qui a entrepris ce recours en justice.

RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de donner réponse à une question orale posée au Sénat le 3 mai 2005 par le sénateur Kinsella concernant la nouvelle ambassade du Canada qui est en cours de construction à Berlin, en Allemagne.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

L'ALLEMAGNE—LA NOUVELLE AMBASSADE

(Réponse à la question posée par l'honorable Noël A. Kinsella le 3 mai 2005)

QUESTION 1 — Le ministre des Affaires étrangères a-t-il assisté à l'inauguration de la nouvelle ambassade du Canada à Berlin, le 29 avril 2005? Sinon, pourquoi?

Le 29 avril 2005, le ministre des Affaires étrangères assistait à la Troisième Conférence ministérielle de la communauté des démocraties, à Santiago au Chili.

QUESTION 2 — Quel est le coût de la nouvelle ambassade?

Les coûts approuvés par le Conseil du Trésor s'élèvent à 101 205 888 $ pour le Canada. Cela comprend l'acquisition du terrain, la conception architecturale et la construction, la réalisation du projet, les fonds de prévoyance et les réserves. Toutefois, il est prévu que le coût final sera moins élevé que le montant des crédits approuvés, à savoir environ 100 millions $.

QUESTION 3 — Le gouvernement du Canada a-t-il confié l'administration de l'édifice à une tierce partie pour des raisons commerciales?

Non. La plupart des missions du Canada dans le monde se trouvent dans des immeubles abritant plusieurs occupants et la nécessité d'assurer la sécurité dans toutes les installations du Canada à l'étranger figure toujours en tête de nos priorités. À Berlin, l'édifice est construit de telle manière que l'ambassade occupe une seule des trois tours du complexe. Les locaux de l'ambassade ne sont pas accessibles à partir des autres parties du complexe. L'ambassade est équipée de tous les dispositifs de sécurité nécessaires et des contre-mesures sont prévues. Des spécialistes de la sécurité ont participé à la conception du complexe, et cela, depuis le début des travaux, et toutes les dispositions requises ont été prises. Rappelons que le Canada demeure propriétaire du terrain.

QUESTION 4 — Quelles sont les modalités et les conditions de l'entente conclue avec Hannover Leasing, notamment en ce qui concerne la location éventuelle de locaux situés dans le complexe de l'ambassade à des organisations ou à des entités qui constituent un sujet de préoccupation pour les services de renseignement canadiens?

Dans les négociations avec le promoteur, le Canada a obtenu l'ajout d'une clause au contrat qui oblige le promoteur en question à le notifier avant de louer des locaux à une quelconque entité à des fins commerciales, marchandes ou résidentielles. C'est ainsi que le Canada peut s'opposer à tout projet de location.

QUESTION 5 — Est-il vrai que le coût des travaux pour la Maison du Canada à Berlin dépasse de 150 p. 100 les prévisions?

Jusqu'ici, les budgets sont respectés. Le Conseil du Trésor a approuvé l'affectation de 101,2 millions $ à ce projet et il est prévu que le coût final sera inférieur à 100 millions $. Par conséquent, il n'y a pas dépassement de coût.

QUESTION 6 — Comment le coût de construction de la nouvelle ambassade à Berlin se compare-t-il à ceux des ambassades de Washington et de Tokyo?

Le coût total de la construction (excluant l'achat et l'aménagement du terrain) du projet de Berlin tournera autour de 70 millions $. Cela comprend les locaux de l'ambassade même ainsi que la partie commerciale réservée au secteur privé. Comme les locaux diplomatiques occupent environ la moitié des installations publiques/privées, le coût de construction de l'ambassade seule est d'environ 35 millions $. Comparativement, la construction de l'ambassade de Washington a coûté 67,5 millions $ en 1988, soit environ 110 millions $ en dollars de 2005. Quant à l'ambassade de Tokyo, elle a coûté 128,3 millions $ en 1991, soit autour de 200 millions $ en dollars de 2005.

LE SÉNAT

HOMMAGE AUX PAGES À L'OCCASION DE LEUR DÉPART

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de passer à l'ordre du jour, j'aimerais attirer votre attention sur le fait qu'un certain nombre de pages du Sénat nous quitteront cette année. J'ai le plaisir de vous en présenter trois qui nous quittent aujourd'hui.

Il s'agit, premièrement, de Christopher Reed, de Halifax en Nouvelle-Écosse. Il vient de terminer son baccalauréat en sciences politiques canadiennes avec spécialisation en histoire. Il espère être admis à la faculté de droit l'automne prochain et souhaiterait servir sa patrie en qualité d'avocat militaire de la Marine. Conscient du fait que rien n'est certain, il songe également à continuer de travailler au Sénat. Christopher a beaucoup aimé son expérience et offre ses meilleurs vœux à tous pour l'avenir.

[Français]

Maxe Joanisse-Blackmore, de la Saskatchewan, est ravi de son expérience au Sénat en tant que page. Les leçons acquises au Sénat l'aideront sûrement à réaliser son rêve de devenir avocat en droit médical et de participer à la rédaction de politiques de santé, plus tard dans la vie, en tant que politicien.

Maxe tient à remercier le programme de pages et tous ceux qui contribuent à sa croissance.

[Traduction]

Et enfin, Clinton Unka, de Yellowknife, dans les Territoires du Nord-Ouest. Après avoir terminé ses études en sciences politiques à l'Université Carleton l'an prochain, Clinton partira vers l'Europe et d'autres destinations exotiques. De plus, il se familiarise avec la politique à l'échelon fédéral, bien sûr, mais aussi en vue de favoriser le développement du Nord et le leadership autochtone au sein de sa collectivité.

Il aimerait en outre remercier ses pairs et les personnes influentes au Sénat qui ont fait de l'expérience qu'il a vécue ici, au cours des deux dernières années, une expérience à la fois enrichissante et mémorable.


[Français]

ORDRE DU JOUR

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—TROISIÈME LECTURE

L'honorable Jean Lapointe propose : Que le projet de loi S-11, Loi modifiant le Code criminel (loteries), tel que modifié, soit lu une troisième fois.

— Honorables sénateurs, je vous demande aujourd'hui d'appuyer ce projet de loi et de l'expédier à l'autre endroit dès maintenant. Honorables sénateurs, au moment où je vous parle, plusieurs milliers de nos concitoyens et concitoyennes engloutissent leurs dernières économies dans ces machines diaboliques que sont les loteries vidéo.

Je n'ai pas l'intention de répéter toutes les atrocités que ces machines causent à la population, mais de jour en jour elles s'attaquent à de nouvelles personnes et, du coup, créent de nouveaux joueurs pathologiques. C'est pourquoi il est urgent d'adopter le projet de loi S- 11 et ainsi, plusieurs milliers de vies humaines seront sauvées.

J'ajouterai en terminant que non seulement nous améliorerons la qualité de vie des Canadiens et des Canadiennes, mais qu'en même temps nous épargnerons des centaines de millions de dollars aux deux paliers de gouvernement.

Son Honneur le Président : Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

[Traduction]

PROJET DE LOI SUR LA SEMAINE NATIONALE DU DON DE SANG

DEUXIÈME LECTURE — SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Milne, appuyée par l'honorable sénateur Christensen, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-29, Loi instituant la Semaine nationale du don de sang.— (L'honorable sénateur Stratton)

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, cet article est inscrit au nom du sénateur Stratton, qui a cédé sa place, afin que je puisse prendre la parole maintenant.

C'est un grand plaisir pour moi d'appuyer le projet de loi S-29, et je ne peux qu'approuver les commentaires qui ont été faits la semaine dernière par madame le sénateur Milne, lorsqu'il a parlé du projet de loi dont nous sommes saisis au nom du sénateur Mercer.

Le projet de loi a pour but de désigner la deuxième semaine de juin Semaine nationale du don de sang. En adoptant le projet de loi S-29, le Canada se joindra à 192 États membres de l'Organisation mondiale de la santé et à plus de 200 organisations bénévoles de collecte de sang dans le monde entier, qui célèbrent déjà, chaque année, la Journée mondiale du don de sang, le 14 juin. Cette journée serait l'un des points saillants de la Semaine nationale du don de sang au Canada.

(1500)

Les donneurs et les volontaires, grâce à leurs initiatives désintéressées, font une contribution inestimable à la santé et au bien-être de leurs concitoyens. Chaque minute de chaque jour, même au moment où nous parlons, il y a quelqu'un, au Canada, qui a besoin d'une transfusion sanguine. En offrant le don de vie, les donneurs deviennent les héros du quotidien dans leurs communautés.

On dit que chaque don de sang a le potentiel de sauver trois vies humaines. Bien que les donneurs et les volontaires ne sauront jamais quelle vie ils ont touchée, ils peuvent se rassurer à la pensée que leur don fera une différence énorme dans la vie de ceux dont la vie en dépend. Ils ont tous les droits d'être fiers en pensant que leurs actes désintéressés ont donné et redonné l'espoir à d'autres humains.

Donner du sang, voilà un geste vraiment désintéressé. Au Canada, les dons de sang sont faits à titre totalement gratieux. C'est une réussite qui mérite d'être célébrée et qui témoigne des valeurs qui nous unissent tous, en tant que peuple.

Au fil des ans, les Canadiens ont su relever le défi. Ils ont su relever le défi parce que la sollicitude et la compassion font partie de leur nature profonde. Au Canada, la tradition veut que chacun vienne en aide à ses concitoyens. En décrétant la deuxième semaine de juin « Semaine nationale du don de sang », nous rendons hommage aux personnes qui donnent, dans l'anonymat et au sens propre, un peu d'elles-mêmes.

Donneurs et receveurs ne se rencontreront jamais et, pourtant, le sentiment de communauté ne se trouvera que renforcé par ces gestes désintéressés de générosité, le don d'une partie de soi pour la survie de l'autre. Il est de notre devoir de souligner et de célébrer ces dons.

Il existe également des raisons d'ordre pratique qui expliquent que nous devons sensibiliser davantage la population à l'importance des dons de sang. Actuellement, moins de 4 p. 100 des Canadiens admissibles donnent effectivement du sang chaque année et, pourtant, la demande en sang et en produits sanguins continue d'augmenter. Les progrès de la médecine et les traitements de plus en plus poussés accroissent sans cesse la demande pour ces produits.

Selon la Société canadienne du sang, environ 137 000 personnes suivent un traitement contre le cancer chaque année. Les personnes atteintes d'un cancer ont souvent besoin de sang pour survivre à leurs traitements. Le nombre de greffes d'organes a augmenté; en 1981, 16 Canadiens sur un million subissaient une greffe; en 2000, ils étaient 59 sur un million. Par greffes, j'entends les greffes du rein, du foie, du cœur, du poumon ou de l'intestin, toutes des opérations longues et complexes nécessitant d'importantes quantités de sang. Les progrès faits dans le traitement d'un vaste éventail d'autres maladies ont également eu pour effet de créer de nouvelles demandes en sang.

Compte tenu de l'urgent besoin de renflouer les réserves de sang, qui sont indispensables pour sauver des vies et permettre à des malades de recouvrer la santé, être un donneur, faire don de la vie, ne demande pas un bien grand sacrifice. J'espère que l'établissement de la Semaine nationale du don de sang donnera à un plus grand nombre de Canadiens l'idée de donner du sang et contribuera à faire en sorte que les besoins, qui augmentent rapidement, soient satisfaits.

J'aimerais également profiter de l'occasion pour souligner la précieuse contribution de la Société canadienne du sang et de Héma- Québec, qui gèrent le système de collecte et de distribution de sang au Canada. Depuis la création de ces deux organismes en 1998, la confiance dans la sécurité et l'intégrité des banques de sang a pu être rétablie. En plus d'assurer un dépistage et des tests sanguins efficaces, ces organismes visent la sécurité dans tous les aspects de la gestion des réserves de sang, de la collecte à la conservation en passant par la réglementation. Parallèlement, ils se situent à l'avant- garde de l'innovation, répondant aux nouveaux besoins qui se font jour dans les domaines de la transfusion et de la transplantation.

Les Canadiens peuvent se fier entièrement à la politique, à la gestion et au fonctionnement du système de collecte et de distribution du sang au pays. Je tiens à féliciter ces deux organismes pour leur excellent travail, leur dévouement et leur engagement, en tant que parties intégrantes de notre système des soins de santé.

Honorables sénateurs, nous devons rendre hommage aux donneurs de sang, aux donneurs de vie. Je souhaite que l'adoption de ce projet de loi ne serve pas seulement à reconnaître et à célébrer les donneurs, mais qu'elle encourage également de nombreuses autres personnes à faire comme eux. Nous devons nous assurer que nous disposerons de réserves de sang sûres et vitales lorsque nous en aurons besoin pour nos voisins, notre famille, nos concitoyens ou encore pour nous-mêmes. J'invite donc les honorables sénateurs à se joindre à moi et à appuyer ce projet de loi.

AGRICULTURE ET FORÊTS

AUTORISATION DE SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, je propose :

Que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à siéger à 16 heures aujourd'hui, le mardi 17 mai 2005, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, un jour, certains répondront non à cette question. Il y a d'autres comités, comme le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères, qui aimeraient avoir la permission de siéger. Nous risquons bientôt de faire la démonstration que le Sénat n'est pas important et que ce sont les comités qui le sont.

Je sais que les comités sont très importants mais, pour moi, c'est d'abord et avant tout le Sénat qui a la priorité.

[Traduction]

Je serai favorable à la motion mais je répète que je vais me lever pour prendre la parole chaque fois que l'on demandera la permission de siéger, même si la motion a rapport à mon propre comité. Notre premier devoir est d'être ici au Sénat. Si le Comité des affaires étrangères demandait la permission de siéger au moment où un projet de loi était inscrit à mon nom au Feuilleton et que je souhaitais en débattre, qu'est-ce que je ferais? Est-ce que j'oublierais mon projet de loi pour participer à la réunion du comité ou est-ce que je resterais au Sénat? Je ne m'opposerai pas aujourd'hui mais, un bon jour, quelqu'un va certainement s'opposer à une telle demande de permission.

Son Honneur le Président : Je considère que la permission est accordée, honorables sénateurs.

Le sénateur Rompkey : Je souhaite assurer au sénateur Prud'homme que nous ne proposons pas de telles motions sans bien y réfléchir. Je crois comprendre que cet après-midi, un ministre est disposé à rencontrer le comité. Nous avons l'habitude de faire preuve de souplesse lorsqu'un ministre est disponible.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Harb, appuyée par l'honorable sénateur Mercer, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-22, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (obligation de voter).—(L'honorable sénateur Austin, C.P.)

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'aimerais remercier le sénateur Harb d'avoir présenté le projet de loi S-22. Comme il l'a indiqué clairement, bien que le projet de loi propose un système de vote obligatoire qui fonctionnerait un peu comme la loi de l'Australie qui oblige les électeurs à voter, l'objectif premier du projet de loi est d'encourager le Sénat à débattre des raisons pour lesquelles on observe depuis longtemps une baisse de la participation des électeurs aux élections nationales.

Les Canadiens ne sont pas chauds à l'idée d'une loi coercitive. Depuis longtemps, nous sommes plutôt en faveur de laisser nos citoyens agir de manière responsable et dans le cadre d'une société civile informée et active. Le Canada est une démocratie mature et respectée. Tous les citoyens adultes ont le droit de vote, et tous les partis politiques, les médias et d'autres groupes encouragent constamment les Canadiens à voter.

La question qui se pose est donc la suivante : quelles sont les raisons, évidentes ou sous-jacentes, de la baisse du taux de participation aux élections nationales enregistrée au cours des dernières décennies? Cette baisse exigeait qu'on examine la question adéquatement, et le gouvernement a lancé un processus d'examen en février dernier.

(1510)

Ses principales composantes incluent des tables rondes régionales, où spécialistes et intéressés se penchent sur les problèmes que soulève la réforme démocratique, des travaux de recherche sur les défis qui se posent à notre démocratie et sur les solutions possibles, des ateliers de discussion, afin de définir la perception qu'ont les citoyens de notre démocratie et les valeurs qui sous-tendraient la façon dont ils élimineraient le déficit démocratique, et un prochain colloque sur les connaissances civiques.

Sans préjuger du processus diagnostique du gouvernement, le thème clé qui apparaît a trait à l'importance de hausser le niveau de connaissances civiques. Des études portent à croire que la participation électorale est liée en bonne partie à une faible connaissance de la chose politique, en particulier chez les jeunes. De plus, il est établi que le niveau de connaissances civiques est bas et qu'il peut avoir chuté considérablement depuis quelques décennies. Ces mêmes études montrent que les taux de participation s'élèvent avec l'âge des électeurs. Est-ce à dire que les générations précédentes étaient plus engagées à l'égard de la société et du processus électoral? Ou alors, est-ce que cela voudrait dire que les électeurs plus âgés, généralement mieux nantis et ayant un plus grand sentiment de vulnérabilité, se concentrent davantage sur leurs intérêts et tiennent donc à choisir les orientations politiques qui leur conviennent mieux?

Un autre facteur à prendre en compte en ce qui a trait aux taux de participation électorale est peut-être l'opposé de l'argument que je viens de faire valoir. Bref, appelons cela la satisfaction des électeurs. Il faudrait des données empiriques, mais en période de croissance économique, les taux de chômage diminuent et le bien-être matériel domine, et les gens peuvent simplement penser que le fait de s'abstenir est, indirectement, un vote en faveur du statu quo. Peu importe ce qu'on en pense, il est objectivement clair que moins de membres des groupes de jeunes électeurs expriment un intérêt envers les questions de politique gouvernementale. Ces groupes s'intéressent moins aux questions touchant la gestion gouvernementale et politique.

Nos grands partis politiques fédéraux ont donc raison de recruter activement des membres plus jeunes. Le Parti libéral du Canada, par exemple, a une section jeunesse dont les membres jouissent d'une position privilégiée au cours des assemblées nationales et provinciales ainsi que du droit de participer à la sélection des candidats convoitant le poste de chef du parti national ou des candidats au poste de député dans les diverses circonscriptions. Cette action positive de la part du Parti libéral du Canada a grandement favorisé son militantisme et sa prise de conscience, de bonne heure, des changements qui se produisaient dans les attitudes générationnelles.

J'en arrive maintenant au vote obligatoire et à la question de savoir s'il convient d'aller dans cette voie. Plus tôt dans le débat, le sénateur Kinsella a soulevé la question du droit de vote tel qu'il est inscrit à l'article 3 de la Charte des droits et libertés, qui précise :

Tout citoyen canadien a le droit de vote et est éligible aux élections législatives fédérales ou provinciales.

En faisant valoir son opposition au projet de loi S-22, le sénateur Kinsella a demandé si le droit de vote comprenait implicitement le droit de ne pas voter. Je conviens avec le sénateur Kinsella que la Charte soulève un obstacle important à une mesure législative sur le vote obligatoire. De toute façon, dans ce débat, il faut se demander si une loi sur le vote obligatoire serait dans l'intérêt public. Autrement dit, le vote obligatoire cadre-t-il avec notre compréhension collective de la démocratie et de la liberté politique?

Quand la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis, dirigée par Pierre Lortie, s'est penchée sur le vote obligatoire dans son rapport de 1991, elle a rejeté cette idée jugeant qu'elle était contraire à nos valeurs. On peut lire ce qui suit dans le rapport :

Même si tous les efforts doivent être faits pour que les électeurs soient inscrits et puissent voter s'ils le veulent, l'intérêt public en matière de démocratie électorale ne réside pas dans l'obligation de voter des citoyens. L'approche au Canada consiste à tenir pour acquis que les électeurs ont le droit de ne pas voter, ce que nous acceptons.

La Commission Lortie a conclu que le vote obligatoire serait inacceptable pour la plupart des Canadiens, compte tenu du sens qu'ils attribuent à une société libre et démocratique.

Autrement dit, la commission estimait que le vote obligatoire est contraire à notre tradition consistant à considérer le vote comme un droit librement exercé. Je suis d'accord aussi bien avec la Commission Lortie qu'avec le sénateur Kinsella à cet égard. Je crois que la plupart des Canadiens tiendraient le vote obligatoire pour une atteinte à leur liberté personnelle. Le sénateur Harb croit que la catégorie « Aucun de ces candidats » qu'il préconise réglerait le problème de la liberté personnelle puisque, pour lui, une telle catégorie obligerait les gens non à voter, mais à se rendre à un bureau de vote. J'ose croire que les Canadiens ne feront pas la distinction entre ces deux obligations. Ils considéreraient les deux comme étant également contraires à leurs libertés individuelles. Pour défendre son projet de loi, le sénateur Harb nous dit que 70 à 80 p. 100 des Australiens appuient le vote obligatoire.

Je voudrais attirer l'attention des honorables sénateurs sur une enquête réalisée en 2000 par l'Institut de recherche en politiques publiques, qui avait conclu que 73 p. 100 des Canadiens s'opposent à l'idée du vote obligatoire. Il semble donc que les Canadiens et les Australiens ne partagent pas le même point de vue et qu'un nombre égal de Canadiens sont opposés au vote obligatoire dans notre système.

Même s'il est incontestable qu'il faut tout faire pour encourager les Canadiens à voter et favoriser leur participation, s'ils souhaitent le faire, nous devons respecter les choix individuels. Je crois que c'est la raison la plus probable pour laquelle la plupart des démocraties occidentales n'imposent pas le vote et pour laquelle les pays qui ont adopté le vote obligatoire ont tendance à ne pas le mettre en vigueur. De plus, je note que d'autres pays, comme les Pays-Bas et l'Autriche, ont abrogé leur loi établissant le vote obligatoire. Il faut donc croire que le vote obligatoire n'est pas une panacée en démocratie.

La Commission Lortie a signalé une autre question importante dans son rapport, celle de l'équité de la mise en vigueur d'une loi imposant le vote. Le rapport note que les lois de ce genre sont rarement appliquées avec efficacité ou équité parce qu'il faut accorder aux citoyens le bénéfice du doute quand ils expliquent pourquoi ils n'ont pas voté. Le résultat final est que beaucoup de gens sont poursuivis et condamnés à des amendes sans savoir qu'ils auraient tout simplement pu présenter une excuse raisonnable, qu'elle soit vraie ou fausse. Ceux qui présentent une telle excuse, vraie ou fausse, ne sont pas poursuivis.

Je conviens très volontiers que nous devons faire quelque chose face à la baisse du taux de participation des électeurs. Il est évident que les baisses considérables dont nous avons été témoins ces 15 dernières années n'augurent pas bien de l'avenir de notre démocratie, si la tendance se maintient. À condition de ne pas trop exagérer, le niveau de participation des électeurs donne une bonne idée de l'état de notre démocratie. Voter est, pour les Canadiens, la façon la plus simple de participer. Rien ne prouve d'ailleurs qu'ils remplacent le vote par d'autres actes de participation, comme on peut s'en rendre compte en notant la baisse de l'effectif des partis politiques. Je crois que nous pouvons conclure que le vote obligatoire ne s'attaque pas aux causes profondes du malaise démocratique que nous connaissons actuellement. Il ne servirait en fait qu'à masquer les sentiments réels des Canadiens. Nous perdrions notre meilleur moyen de mesurer l'engagement réel des Canadiens envers le système démocratique.

Le vote obligatoire pourrait entraîner une hausse des taux de participation, mais ce ne serait alors qu'une mesure artificielle. Nos partis politiques, nos fondations indépendantes, nos instituts et nos grands universitaires devraient chercher des moyens de favoriser le civisme, comme première étape de règlement du problème de la participation et de la question plus vaste de l'engagement civique. Le gouvernement devrait appuyer financièrement leurs efforts par l'entremise d'un organisme indépendant qu'établirait le Parlement.

Je termine en énonçant à nouveau le problème. Quelle est la politique publique la plus importante? Devons-nous exiger de connaître le choix politique de chaque citoyen en âge de voter grâce à un système de vote obligatoire, ou bien devons-nous laisser à chaque citoyen en âge de voter le droit de décider s'il veut participer ou non au processus électoral? Le sénateur Harb nous rend un grand service en soulevant ces questions.

Honorables sénateurs, s'il n'y a pas d'autres orateurs à cette étape de nos délibérations sur le projet de loi S-22, je propose que l'objet du projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles pour étude et rapport.

Son Honneur le Président : Avant de mettre la motion aux voix, je voudrais savoir si d'autres sénateurs souhaitent prendre la parole.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

(1520)

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

TROISIÈME RAPPORT DU COMITÉ—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Smith, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Robichaud,C.P., tendant à l'adoption du troisième rapport du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement (Code régissant les conflits d'intérêts des sénateurs), déposé au Sénat le 11 mai 2005.—(L'honorable sénateur Joyal, C.P.)

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, je me réjouis d'avoir l'occasion aujourd'hui d'examiner le rapport du Comité du Règlement sur la proposition de code régissant les conflits d'intérêts des sénateurs.

C'est une question qui m'intéresse d'une façon particulière. Quand nous avons publié notre livre sur le Sénat — je dis « nous » parce que de nombreuses personnes ont contribué à cet ouvrage, qui a été publié en 2003 — parmi lesquelles on comptait d'éminentes personnalités comme le professeur David Smith, professeur émérite de science politique à l'Université de la Saskatchewan, et le professeur Paul Thomas, professeur de science politique à l'Université de Winnipeg. Je voudrais d'ailleurs citer le professeur Thomas qui, à la page 210 du livre, a soulevé la question des conflits d'intérêts pour les sénateurs, et je cite : « Le Sénat est toujours soupçonné de soutenir une élite économique privilégiée, comme en témoigne le fait que les journalistes scrutent les postes d'administrateurs détenus par les sénateurs; de plus, on demande régulièrement l'adoption de règles plus strictes en matière de conflits d'intérêts et de divulgation pour mieux encadrer leur comportement. »

Cette question, je le répète, a été soulevée par presque toutes les personnes qui ont contribué au livre, et je l'ai fait moi-même dans mon chapitre. Ce n'est pas lorsque le leader du gouvernement de l'époque, le sénateur Carstairs, a déposé, en février 2003, une motion chargeant le Comité du Règlement d'étudier un avant-projet de loi et une ébauche de code, parce que les deux ont été déposés en même temps, comme les sénateurs s'en souviendront.

Nous nous sommes d'abord penchés sur l'avant-projet de loi. Nous avons convenu à la fin de l'étude que le projet de loi devrait être divisé, c'est-à-dire qu'il devrait y avoir un commissaire à l'éthique pour la Chambre des communes et un conseiller sénatorial en éthique pour le Sénat. Nous pensions, et à bon droit, selon moi, que le Sénat a un statut constitutionnel différent par rapport à l'autre endroit et que notre conseiller sénatorial en éthique devrait échapper aux problèmes politiques qui pourraient surgir dans l'autre endroit. Ce qui s'est passé en moins d'une année relativement au commissaire à l'éthique dans l'autre endroit nous donne raison.

Après avoir étudié l'avant-projet de loi, le Comité du Règlement a amorcé l'étude du code. Comme les sénateurs se le rappelleront, le code a été présenté en même temps que le projet de loi. Celui-ci était adapté avant tout aux besoins de l'autre endroit.

Selon moi, cela posait problème si nous souhaitions rédiger ou élaborer un projet de loi qui répondrait aux besoins du Sénat. Ne devrions-nous pas avoir un code répondant aux besoins du Sénat? C'est donc aux membres du comité qu'il revenait d'examiner l'avant-projet de code dans cette optique. C'est là un point très important.

En 1996, la Cour suprême du Canada a rendu une décision qui fait autorité depuis en matière de code de conduite. En effet, au paragraphe 18 de la décision majoritaire rendue dans l'affaire R.c. Hinchey, le juge L'Heureux-Dubé dit ceci :

À mon avis, compte tenu de la confiance et des lourdes responsabilités qui se rattachent aux charges publiques, il est normal que les fonctionnaires du gouvernement soient en conséquence tenus de se conformer à des codes d'éthique qui, pour un simple citoyen, apparaîtraient très sévères. Pour le public, qui est le bénéficiaire ultime de la probité d'un gouvernement, il n'est pas si facile de faire la part entre les avantages qui sont légitimes et ceux dont la motivation est malhonnête.

Autrement dit, les juges de la Cour suprême du Canada ont cherché très clairement à déterminer un niveau d'obligation pour quiconque occupe une charge publique, ou assume un devoir public, relativement à la conformité à des normes d'éthique et de transparence très sévères. La question est de savoir où tirer la ligne entre les intérêts privés d'un sénateur et le besoin de transparence du public. Là est le nœud de la question.

Comme tout citoyen du pays, nous avons droit au respect de notre vie privée. Ce droit est fondamental. Il est tellement fondamental que l'article 12 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée en 1948, dit :

Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation.

Il y a aussi, et mon collègue, le leader de l'opposition, sera certainement d'accord avec moi, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, que le Canada a ratifié et qui est entré en vigueur en 1976 et qui dit ce qui suit à l'article 17 :

Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes illégales à son honneur et à sa réputation.

Il s'agit de l'article 17(1) du Pacte international.

La Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales renferme un article semblable, à savoir l'article 8, mais je vais vous en épargner la lecture.

Notre Charte renferme deux articles clés sur les droits relatifs à la vie privée, soit les articles 7 et 8. Je vais lire l'article 8 en français, parce que la citation dont je veux vous faire part m'a été fournie en français.

[Français]

Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.

Comment les tribunaux ont-ils interprété cet article ou cette protection?

L'article 8 protège les personnes et non les lieux.

[Traduction]

Cette disposition vise donc à protéger les personnes et non les lieux ou le logement comme tels.

[Français]

Il protège en particulier un ensemble de renseignements biographiques d'ordre personnel que les particuliers pourraient, dans une société libre et démocratique, vouloir constituer et soustraire à la connaissance de l'État. Il s'agit notamment de renseignements tendant à révéler des détails intimes sur le mode de vie et les choix personnels de l'individu.

[Traduction]

Autrement dit, ce sont le style de vie et les choix personnels qui sont en cause, ce qu'a d'ailleurs confirmé la Cour suprême en 1993 dans son arrêt R. c. Plante.

Honorables sénateurs, quand j'ai lu le projet de code de conduite, je n'ai pu m'empêcher de me demander s'il n'allait pas remettre en question certains principes. Personnellement, j'estime qu'il existe deux grands ensembles de principes. Les premiers sont ceux qui relèvent de la Charte des droits. Autrement dit, ce n'est pas parce que nous sommes sénateurs que nous devons renoncer aux droits que nous confère la Charte. Dans le cas de ce projet de code, la Charte nous garantit deux droits : le droit à la vie privée et le droit à la juste application de la loi. Si je devais être jugé en ma qualité de sénateur, je voudrais bénéficier de la juste application de la loi, comme me le garantissent les articles 7 et 11 de la Charte.

(1530)

Je crains, par ailleurs, qu'en adoptant un code sur les conflits d'intérêts, nous n'en venions à changer fondamentalement le Sénat. En effet, nous modifierions l'obligation imposée à chaque sénateur et la façon dont notre institution maintient la discipline dans ses rangs. Le code est synonyme de changements à deux niveaux : à celui de chaque sénateur, pris individuellement, et à celui de l'institution.

Je me suis alors demandé comment nous devrions nous y prendre et ce à quoi nous devrions nous intéresser avant tout. En novembre 2004, j'ai décidé d'écrire à la commissaire à la protection de la vie privée. Je lui ai fait parvenir un exemplaire de notre projet de code afin de bénéficier de ses vues. Si vous me le permettez, je vais vous lire la lettre qu'elle m'a adressée le 18 février dernier, en français bien évidemment :

[Français]

Les enjeux que vous soulevez dans votre lettre sont importants. En effet, toute intrusion dans la vie privée d'un citoyen doit être justifiable dans une société où ce même droit est reconnu et protégé. Cela est d'autant plus vrai lorsqu'il s'agit d'informations reliées à la déclaration des actifs et passifs d'un citoyen, ainsi que celles relatives aux actifs et passifs d'un conjoint de droit ou de fait.

Une vérité axiomatique des renseignements personnels est que, plus on est près de l'historiographie d'une personne incluant l'information sur la santé, plus ces renseignements personnels doivent faire l'objet d'une protection adéquate.

[Traduction]

Que dit-elle au sujet de ce projet de code? Elle ne se prononce pas sur chaque petit article, mais je pense qu'elle nous conseille à propos de ce sur quoi nous devrions nous arrêter pour adopter un code de conduite. Quels sont ces conseils?

Eh bien, la commissaire à la protection de la vie privée, Mme Stoddart, a joint à sa réponse le texte d'un long exposé qui avait été donné lors d'un congrès international qui s'est déroulé en septembre 2004, en Pologne. Ce congrès a été l'occasion de rassembler les commissaires à la protection de la vie privée du monde entier pour les inviter à réfléchir sur les questions que nous abordons précisément dans notre code d'éthique. Voici, essentiellement, ce que dit le document en question :

La vie privée est une liberté instrumentale. Elle permet de jouir effectivement des autres droits fondamentaux.

La protection de la vie privée garantit que :

... toute personne dispose d'une bulle dans laquelle elle peut développer son identité propre, entretenir des relations de confiance et d'intimité avec les autres et préserver sa dignité. »

En d'autres termes, le choix dans certains cas entre le droit à la vie privée et la divulgation est un exercice impliquant l'application de certains critères quant aux limites à respecter. Voici la question qu'il convient de se poser : où se situe la limite entre, d'une part, notre droit à la vie privée, à notre style de vie, à notre capacité de préserver l'intimité de nos relations, à notre capacité d'évoluer comme nous l'entendons en société et, d'autre part, la nécessité de transparence?

Honorables sénateurs, la réponse à cette question épineuse se trouve en fait à l'article 1 de la Charte. Le leader du gouvernement au Sénat se rappelle sûrement la discussion que nous avons eue sur cet article précis de la Charte. Notre droit à la vie privée n'est pas souverain. Ce n'est pas un droit absolu.

Son Honneur le Président : Je regrette de devoir interrompre le sénateur Joyal, mais je me dois de lui signaler que ses 15 minutes sont écoulées.

Le sénateur Joyal : Honorables sénateurs, j'ai assisté à 26 séances du comité sur la question, et les membres du comité ont fait preuve d'une grande clémence en me permettant de parler. C'est la dernière chance qui me sera offerte. C'est pourquoi je demande au Sénat la permission de poursuivre.

Des voix : D'accord.

Le sénateur Joyal : L'article 1 de la Charte établit que le droit à la vie privée n'est pas absolu. En effet, en vertu de cet article, la Charte garantit ce droit, qui ne peut être restreint « que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables ». Quelles sont alors les limites raisonnables du droit à la vie privée d'un sénateur? Nous devrions mesurer ces limites à l'aide des critères énoncés dans l'arrêt Oakes. Il s'agit d'un jugement rendu par la Cour suprême, donnant interprétation à l'article 1 de la Charte et dans lequel il a été établi que lorsqu'une personne empiète sur les droits d'une autre personne, elle doit le faire de manière, et je cite : « à porter le moins possible atteinte au droit en question ». En d'autres mots, il s'agit d'appliquer le critère de l'atteinte minimale. Si nous devons restreindre le droit à la vie privé des sénateurs ou obliger ces derniers à déclarer un intérêt personnel ou encore à divulguer des choses ou de l'information qui devraient normalement rester confidentielles, alors nous devrions d'abord appliquer le critère de l'atteinte minimale afin de satisfaire à la nécessité de transparence.

Honorables sénateurs, j'ai le plaisir d'annoncer que le comité a accepté ces deux éléments essentiels, soit le respect du droit à la vie privée et le critère de l'atteinte minimale. Ces deux éléments sont bien expliqués aux articles 2(2) et 49 du code proposé. Ces deux éléments essentiels du code ont été acceptés après de longues discussions en comité. Je suis redevable à tous les sénateurs siégeant au comité qui ont fait preuve d'ouverture à l'égard de cette argumentation.

En vertu de l'article 2(2) du code :

Le Sénat déclare en outre que le code doit être interprété et appliqué de manière que les sénateurs et leur famille puissent raisonnablement s'attendre au respect de leur vie privée.

Enfin, l'article 49 stipule assez clairement que :

Le présent code doit être interprété et appliqué de manière à entraver le moins possible l'attente raisonnable des sénateurs en matière de respect de leur vie privée.

Le code prévoit ces critères, et c'est ce qui importe selon moi. Ainsi, lorsqu'une conduite posera un dilemme, le conseiller sénatorial en éthique et les sénateurs pourront appliquer ces critères pour régler la question.

En fait, le comité a appliqué ces critères aux 18 obligations contenues dans le code. Le code comporte en effet 18 obligations auxquelles doit se plier chaque sénateur. J'aimerais maintenant citer quelques-unes de ces obligations qui ont été soumises aux critères du respect de la vie privée, de l'atteinte minimale et de la transparence. Je vais n'en mentionner que deux : la première est le cas de l'intérêt de la famille ou du conjoint.

Il y a quelques années, nombreux d'entre nous oeuvraient à la promotion de l'égalité du conjoint, ou du conjoint de fait dans le cas des familles de fait. Je pense au sénateur Bacon, qui a beaucoup contribué aux progrès réalisés à cet égard au Québec. Nous savons que l'égalité des sexes, garantie à l'article 28 de la Charte, facilite ces changements. Votre époux, mon épouse, sont traités de la même façon dans le couple.

Si nous devons soumettre cette personne à certaines obligations, celles-ci ne devraient porter que sur les questions qui la mettent en situation de conflit d'intérêt. Si la conjointe d'un sénateur décroche un contrat avec le gouvernement, le public pourra présumer que le sénateur en question l'a aidée à obtenir le contrat. Le public doit savoir que, dans ces cas-là, tout sera divulgué. En d'autres mots, nous protégeons la vie privée du couple dans la mesure ou l'intérêt du public n'est pas en jeu.

(1540)

Je tiens à remercier les membres du comité. Ce n'était pas un débat facile, mais j'estime que notre proposition répond au critère énoncé à l'article 1 de la Charte.

Je passe maintenant, honorables sénateurs, à la deuxième série de principes qui, effectivement, dictent les changements apportés au Sénat par la création du poste de conseiller sénatorial en éthique aux termes du projet de loi C-4. En d'autres mots, quels principes devrions-nous respecter maintenant que nous avons un conseiller sénatorial en éthique, et quelle est la responsabilité du Sénat en ce qui concerne la discipline?

Les honorables sénateurs se souviendront que le tribunal a décidé du pouvoir qu'exerce le Sénat sur les sénateurs, et que le droit du Sénat à faire régner la discipline dans son enceinte est absolu et exclusif. Par conséquent, le tribunal a jugé que cette question n'était pas de son ressort.

Je rappelle aux sénateurs que nous étudions ici la question des droits du Parlement. Le Parlement a le droit d'imposer des sanctions à ses membres. Le Sénat a le droit fondamental d'imposer des sanctions à ses membres. En créant le poste de conseiller sénatorial en éthique, nous devons veiller à ce que, en tant qu'assemblée, nous conservions le droit d'exercer ce pouvoir sur nos membres, autrement dit, d'imposer des sanctions à nos membres.

À bien des égards, le comité a étudié soigneusement diverses parties du code pour garantir que le conseiller sénatorial en éthique pourrait faire son travail, vérifier une allégation, enquêter au besoin et présenter un rapport et des recommandations au comité, dans le respect des droits du Sénat sur ses membres, comme l'ont décidé depuis 1884 les tribunaux qui ont interprété la responsabilité du Parlement. Honorables sénateurs, la question est importante. Qui contrôle le conseiller sénatorial en éthique est une question dont dépend la crédibilité du système.

Si nous, au Sénat, devons garder cette capacité d'exercer notre responsabilité, nous ne pouvons pas mettre de côté l'autre aspect du poste de conseiller sénatorial en éthique, c'est-à-dire, son budget Je voudrais m'adresser au Président. La mesure législative précise très clairement que le Président joue un rôle dans ce contexte, et le Président est notre représentant. Permettez-moi de citer le paragraphe 20.4(8) de la Loi sur le Parlement du Canada :

L'état estimatif est examiné par le président du Sénat puis transmis au président du Conseil du Trésor...

Honorables sénateurs, le Président peut assumer sa responsabilité par le truchement du comité consultatif du Président, ou CCP. Ce comité a été créé par l'ancien Président, le regretté Gildas Molgat. Aux fins de son examen de l'état estimatif du conseiller sénatorial en éthique, le Président peut demander l'avis du comité consultatif spécial du Sénat, auquel siègent les leaders des deux côtés et tout autre personne qu'invite le Président, en consultation avec les leaders. En d'autres termes, nous conserverons encore la capacité d'exprimer un avis sur le budget du conseiller sénatorial en éthique.

L'autre point important, c'est que le conseiller sénatorial en éthique n'est pas totalement libre de toute révision judiciaire. Les sénateurs se rappellent que l'été dernier, en juillet plus précisément, la Cour fédérale a entendu une affaire opposant Démocratie en surveillance et le Procureur général du Canada (Bureau du conseiller en éthique) et concernant le conseiller en éthique d'alors, Howard Wilson. En plus d'accéder à la requête, le tribunal a jugé que l'ancien conseiller en éthique s'était mal acquitté d'une partie de sa responsabilité. Il s'agit d'une affaire très grave.

Nous avons inscrit dans notre mesure législative le statut d'un conseiller sénatorial en éthique. Bien sûr, celui de l'ancien n'était pas défini dans la loi. C'était seulement une décision administrative du premier ministre. C'était une prérogative du premier ministre. Désormais, nous avons une loi.

J'ai lu à la page A3 de l'édition du 11 mai de l'Ottawa Citizen, qui remonte à moins d'une semaine, que Duff Conacher, le coordonnateur de Démocratie en surveillance, a indiqué que son groupe indépendant est en train de préparer un dossier, qui doit être porté devant le tribunal, contre M. Shapiro en raison de son apparente partialité envers le Parti libéral. Cette affaire sera jugée très bientôt. C'est important, honorables sénateurs, car nous avons tenté dans la mesure du possible, dans le projet de loi initial, de protéger les droits des sénateurs dans l'exercice de leur responsabilité — à l'aide des articles 20.5(2) et 20.5(3); en fait, le droit des sénateurs d'exercer leur responsabilité et leur devoir, sous la protection du Parlement, était très clairement énoncé dans le projet de loi. Comme je l'ai dit, la question n'est pas classée car la décision rendue par la Cour fédérale l'été dernier laisse planer un doute.

Honorables sénateurs, les médias vont également surveiller la gestion du conseiller sénatorial en éthique. Il ne fait nul doute que les médias vont porter une attention particulière à tout ce qui a trait aux activités du conseiller et des sénateurs relativement au code.

L'une de mes préoccupations, que j'ai communiquée aux membres du comité, a trait aux répercussions financières. Si l'un d'entre nous fait l'objet d'une allégation, il devra se défendre. Il se pourrait qu'il doive demander l'aide d'un avocat, ce qui risquerait d'entraîner des frais considérables. Je ne souhaite certes pas qu'un sénateur soit empêché de se défendre par manque de fonds. Le Comité du Règlement n'avait pas pour mandat de prendre une décision à cet égard mais, à la page 3 du rapport, le comité indique clairement que bien qu'il prenne ces questions très au sérieux, il a conclu que cet aspect, soit l'aide financière, ne relevait pas de son mandat. Précisons toutefois que l'élaboration d'une politique régissant les dépenses liées au code relève du mandat du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration.

Il est très important de ne pas perdre cet aspect de vue, car nous ne pouvons faire abstraction du fait qu'il s'agit là d'une question publique. Nous devons porter une attention particulière à chacune des obligations énoncées dans le code. Comme je l'ai dit, le journalisme, bien compris, est un élément nécessaire et intégral de l'exercice démocratique.

Je souhaite terminer en citant à nouveau un extrait des délibérations de la réunion internationale des commissaires à la protection de la vie privée, qui a eu lieu l'automne dernier : « L'humiliation a toujours été une forme de châtiment et elle peut être légitime. L'humiliation signifie, en partie, une ingérence dans la vie privée. Dans la société moderne, les médias sont un instrument d'humiliation. Les médias sont le pilori d'aujourd'hui. Des renseignements personnels ternissant la réputation d'une personne, qu'ils soient exacts ou non, peuvent être recueillis et diffusés si rapidement et dans une mesure telle qu'ils ne peuvent pas être retirés et ils ne peuvent pas non plus être modifiés intégralement, au besoin, pour apporter des précisions ou des corrections. La réputation de la personne en question est entachée à tout jamais. » C'est une partie de la réalité, honorables sénateurs. En adoptant ce code, nous faisons ce qu'il convient de faire puisque nous avons été en mesure de veiller à ce que les droits dont nous jouissons comme citoyens et sénateurs en vertu de la Charte se reflètent bien dans les différentes parties du code, de même que le statut du conseiller sénatorial en éthique ainsi que le statut et les droits du Sénat.

(1550)

De toute évidence, ce n'est pas la fin, c'est plutôt le début. Il sera progressivement adapté à notre situation. Je suis sûr que chaque sénateur qui a assisté aux réunions du Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement en est conscient. J'ai une dette de gratitude envers le président du comité, l'honorable sénateur Smith, parce qu'il nous est arrivé à maintes reprises d'éprouver sa patience, sans jamais entamer sa bonne humeur. À quelques occasions, nous sommes allés assez loin sur certaines questions, mais nous l'avons toujours fait dans le respect mutuel et avec la détermination d'en arriver à un code équilibré. Le code devra être révisé avec les années pour être adapté aux différentes questions qui se poseront. Je remercie tous ceux qui ont participé à cet exercice, et particulièrement le légiste et conseiller parlementaire du Sénat, M. Mark Audcent, qui a travaillé avec moi à l'élaboration d'une vingtaine d'amendements au projet initial, afin que le code reflète mieux les principes communs du Sénat. Honorables sénateurs, je vous suis très reconnaissant de votre attention.

L'honorable W. David Angus : L'honorable sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Joyal : Oui, sénateur Angus, mais j'ai déjà dépassé le temps qui m'est accordé. Je vais donc demander l'autorisation de poursuivre.

Son Honneur le Président : Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Angus : Je félicite le sénateur Joyal pour son excellent exposé sur ce code compliqué, qui revêt un intérêt fondamental pour tous les sénateurs. Ma question porte sur sa déclaration selon laquelle il est très important pour les sénateurs de maintenir leur droit de prendre des mesures disciplinaires contre leurs pairs et de ne pas diluer ce droit fondamental pour se conformer au projet de loi C-4. Je ne sais pas si le sénateur est sûr, si je peux m'exprimer ainsi.

[Français]

Est-ce que vous pouvez nous assurer que nous sommes bel et bien protégés dans nos droits de surveillance en matière de discipline des sénateurs?

[Traduction]

Le sénateur Joyal : Je remercie le sénateur Angus de sa question. Le sénateur Furey a été d'une aide inestimable pour le comité en attirant son attention sur le statut du comité spécial créé par le code. Dans les différentes mesures prises lorsqu'une allégation est faite et lorsque le conseiller sénatorial en éthique agit sur la base d'une allégation, il importe que le comité maintienne un contact étroit avec le conseiller sénatorial. Nous ne voulions pas créer un nouveau Kenneth Starr. Je ne peux pas être plus clair. Nous ne voulions pas d'un conseiller sénatorial dont la principale responsabilité serait celle d'un enquêteur permanent sur la conduite de chaque sénateur, 12 heures par jour, quatre jours par semaine pendant que le Sénat siège. Ce n'était pas l'intention du projet initial. Je tiens à être clair sur ce point. Nous voulions plutôt nous montrer prévenants dans les relations entre le comité et le conseiller sénatorial, tout en permettant à celui-ci de s'acquitter de ses fonctions pour maintenir sa crédibilité. Nous voulions nous assurer que les sénateurs resteraient juges de leurs pairs. Les sénateurs ont été élus au comité pour exercer l'extraordinaire responsabilité de maintenir l'équilibre entre l'autonomie et le rôle du conseiller sénatorial et nos pouvoirs, en tant qu'assemblée.

C'est le test décisif. Le Sénat a-t-il le dernier mot sur le rapport ou la recommandation du conseiller sénatorial, ou bien le dernier mot appartient-il à quelqu'un qui peut rendre public le rapport au cours d'une conférence de presse, de l'autre côté de la rue, et raconter ce qu'il a découvert au sujet du Sénat pour que le public puisse le mettre en pièces? Nous ne voulions pas de cela. Nous avons très soigneusement établi un certain équilibre entre le statut et l'autonomie du conseiller sénatorial et le rôle du comité.

Le sénateur Furey a réussi à attirer l'attention des membres du Comité du Règlement sur les différents éléments à corriger.

Le sénateur Angus : Je vous remercie de cette réponse, sénateur Joyal. Elle montre bien tout ce que nous vous devons pour avoir assisté à ces 26 séances et pour avoir suivi l'évolution du code entre le projet initial et ce que nous avons devant nous aujourd'hui.

Je vais reprendre une question qui m'a déjà été posée et que d'autres sénateurs, qui sont avocats en exercice, se sont peut-être déjà fait poser. Apparemment, le problème, c'est que la création de ce comité est essentielle à la mise en application du code. Ce comité aura une lourde charge à assumer, puisqu'il devra s'interposer pour protéger les sénateurs d'un conseiller sénatorial en éthique trop zélé ou véreux ou encore d'une situation désagréable. Ce qui pourrait se produire, comme ce fut d'ailleurs le cas lors du débat sur la TPS, quand les choses se sont gâtées. Le sénateur Joyal est-il certain que confier à cinq de nos collègues qui ont déjà d'autres obligations au sein d'un comité ou ailleurs ce rôle de surveillance et de protection du droit du Sénat d'avoir le dernier mot sur les questions disciplinaires constitue la meilleure solution?

Le sénateur Joyal : Au cours de mes réflexions initiales sur la façon dont devrait être composé le comité, j'ai pensé que celui-ci devait être constitué de sénateurs occupant une fonction au Sénat. J'avais pensé au leader du gouvernement, au leader de l'opposition et à leurs adjoints, parce qu'ils ont généralement plus d'ancienneté et d'expérience au Sénat que certains autres sénateurs. Ils ont une vision plus globale, parce qu'ils s'occupent des affaires de leur côté respectif en plus d'assumer des responsabilités particulières au Sénat. Ma première réaction a donc été de confier à ces sénateurs la responsabilité de siéger au comité.

Toutefois, le Comité du Règlement en est arrivé à une meilleure solution. Je le dis en toute franchise, car il a accepté — et était fermement convaincu — que les membres du comité soient élus, ce qui est exceptionnel au Sénat. En effet, le Sénat ne compte aucun comité où les membres sont élus par vote secret, justement parce que nous avons le Comité sénatorial de sélection. Nous connaissons les règles; les leaders se réunissent, aux fins de négociation et parfois de consultation, mais c'est à eux qu'appartiennent la décision.

En élisant les membres du nouveau comité, nous assumons une partie de la responsabilité. Les sénateurs qui votent pour élire quelqu'un au comité assument la responsabilité des décisions qui pourront être prises à l'avenir par leurs pairs.

(1600)

En élisant les membres du comité, nous assumons une responsabilité individuelle. Autrement dit, si je décide de voter en faveur de X ou Y, je détermine à qui je confie cette responsabilité si jamais je devais être jugé par mes pairs.

Le fait que les deux côtés élisent les membres du comité et que les quatre sénateurs choisissent le cinquième membre confère un meilleur équilibre. Dans l'ensemble, c'est une meilleure solution parce qu'elle fait appel à notre responsabilité individuelle de déterminer le sénateur à qui nous allons confier cette tâche.

Par conséquent, j'ai volontiers retiré ma proposition et j'ai appuyé la proposition voulant que les membres du comité soient élus par scrutin secret. De cette façon, il n'y a pas de jeu politique, même si n'importe qui peut dire vouloir siéger au comité. Pour ce qui est de la composition et du fonctionnement du comité, cette proposition inspire davantage confiance.

Je suis certain qu'un sénateur ainsi élu ou choisi sera conscient de la grande confiance qu'on lui fait et de sa responsabilité personnelle envers les autres sénateurs. Il aura été choisi par scrutin secret. Je crois que c'est le seul moyen de préserver la confiance des sénateurs. Par exemple, si je dois comparaître devant le comité, je saurai que ses membres sont indépendants. Il ne faut pas oublier que l'indépendance est une qualité fondamentale de toute personne agissant à titre de juge auprès de ses pairs.

À mon avis, la solution proposée dans le rapport du comité devrait répondre aux questions du sénateur.

Le sénateur Angus : Je remercie le sénateur de sa réponse. Je suis d'accord avec lui, mais je dis que c'est une lourde responsabilité qui incombera à ces gens. Il y aura peut-être bien peu de sénateurs à s'inscrire sur la liste des candidats à choisir par scrutin secret. Espérons que cela fonctionnera.

Je pense que la solution proposée représente un magnifique compromis. J'espère que, dans nos rangs, nous trouverons 5 sénateurs prêts à servir et dignes de notre confiance à cet égard.

Ma dernière question porte sur le conseiller sénatorial en éthique. Un conseiller est actuellement en poste. Je crois que ce conseiller fait preuve d'une diligence raisonnable dans l'accomplissement de ses tâches et ses rencontres avec nous. Le sénateur pourrait-il clarifier quel contrôle nous pourrions exercer sur le conseiller sénatorial en éthique si jamais, Dieu nous en garde, il se révélait être une personne malhonnête? Dans quelle mesure pourrions-nous sévir rapidement et quel serait le processus?

Le sénateur Joyal : Comme je l'ai dit plus tôt, le conseiller sénatorial en éthique présente les recommandations au comité à la dernière étape. La décision revient au comité, aux pairs. La loi établit clairement le rôle du conseiller sénatorial en éthique. Le paragraphe 20.5(3) précise :

Il (le conseiller sénatorial en éthique) est placé sous l'autorité générale...

Le terme « autorité générale » a une signification. En d'autres termes, le conseiller sénatorial en éthique jouit d'une liberté d'action, mais l'autorité générale, l'orientation, revient au comité. La loi habilitante ne crée pas un poste de mandataire du Parlement. Nous avons affirmé que le conseiller sénatorial en éthique est un mandataire du Parlement. Si c'est un mandataire du Parlement, il est au sein du Parlement. Il ne s'agit pas d'un enquêteur externe n'ayant aucun lien avec le Parlement. C'est un des nôtres. Il partage notre responsabilité commune à l'égard de mesures disciplinaires et le projet de loi précise que le conseiller sénatorial en éthique jouit des privilèges et immunités du Sénat et de ses membres lorsqu'il remplit ces devoirs et fonctions. Il fait certainement partie de l'institution du Sénat. C'est ce que dit le projet de loi.

En définissant le rôle du comité, nous tenions à ce que le conseiller sénatorial en éthique, à qui nous accordions le pouvoir d'enquêter, soit en mesure de mener ces enquêtes. Cependant, pour ce qui est de la diligence raisonnable et des droits des sénateurs, ainsi que de l'accueil des recommandations à la fin du processus, la décision revient au comité qui fait alors rapport au Sénat. Autrement dit, par rapport à la décision du comité, c'est le Sénat qui, légalement, a le dernier mot.

Je veux préciser un facteur important à considérer. Nous ne désignons pas cinq sénateurs qui formeront le comité et qui feront ce qu'ils veulent de nous. Cela n'est pas l'intention. Le comité siège, prend connaissance des rapports du conseiller sénatorial en éthique, puis il en fait rapport à l'ensemble du Sénat. C'est au Sénat qu'il revient, au moyen d'une motion, d'accepter ou non le rapport du comité. Il y a une gradation des étapes du processus qui maintient le rôle disciplinaire du Sénat.

Honorables sénateurs, en adoptant ce code, nous avons aidé l'autre endroit. Je pense sincèrement qu'ils auront des problèmes à l'autre endroit; tôt ou tard, il y aura une situation conflictuelle. L'affaire prendra une dimension politique. Nous avons pu le constater avec la première décision du commissaire à l'éthique qui a suscité une énorme controverse. On le menace de poursuites devant les tribunaux.

C'est aussi une leçon pour nous. Nous ne voulons pas qu'à la première occasion, notre conseiller en éthique ait à faire face à la justice. Nous voulons un système plus équilibré. Je pense que nous avons tous fait de notre mieux pour mettre nos esprits et notre expérience à contribution pour proposer un code pouvant fonctionner.

Comme je l'ai dit, ce sera difficile. Je ne peux pas affirmer qu'il n'y aura jamais de problème. Nous savons comment les choses fonctionnent. C'est cela la politique. Par contre, c'est la politique dans le respect de la Charte et des véritables principes sur lesquels s'appuie notre institution.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Je veux d'abord féliciter le sénateur Joyal d'avoir si bien exposé, comme le sénateur Angus l'a dit, les principes sous-jacents de ce code. Comme les sénateurs le savent, j'étais très mécontent du mot « éthique ». Je trouve que c'est un mot qui ne convient guère. En consultant l'ordre du jour, j'ai remarqué qu'il y est question d'un code de conflits d'intérêts, ce qui me semble plus juste.

Le sénateur Joyal a participé étroitement au processus depuis le début. Il connaît mes réserves à cet égard. Le Sénat n'est pas une Chambre habilitée à prendre un vote de confiance. C'est une Chambre indépendante qui est impartiale politiquement, sans toutefois transcender les considérations politiques du fait de la nature de nos nominations.

Le nouveau comité tiendra des débats, bien sûr, mais ses conclusions ne seront pas aussi sectaires que ce le sera à l'autre endroit parce que notre Chambre n'est pas habilitée à prendre un vote de confiance. Par conséquent, une des choses que nous devrions préserver, c'est notre indépendance et les privilèges que nous confère la Constitution.

Ce préambule rassure-t-il l'honorable sénateur sur le fait que le code de conduite ne restreindra pas indûment les obligations d'indépendance des sénateurs aux termes de la Constitution? Un sénateur peut-il prendre part à la vie économique, sociale et religieuse de sa région et s'impliquer dans les écoles pour mieux représenter ces intérêts collectifs et individuels ici au Sénat?

Le sénateur Joyal : Pendant que le sénateur posait sa question, je pensais à quelques-unes des interventions qu'il a faites au sujet du projet de loi initial, soit le projet de loi C-34, puis le projet de loi C-4.

L'article 2 du code énumère brièvement quelques principes qui traitent des concepts dont l'honorable sénateur vient de parler.

(1610)

Je vais lire l'article en question :

2(1) : Vu que le service parlementaire est un mandat d'intérêt public, le Sénat reconnaît et déclare qu'on s'attend à ce que les sénateurs :

a) continuent à faire partie intégrante de leurs communautés et régions et y poursuivent leurs activités tout en servant, au mieux de leurs moyens, l'intérêt public et les personnes qu'ils représentent;

b) remplissent leur charge publique selon les normes les plus élevées de façon à éviter les conflits d'intérêts et à préserver et accroître la confiance du public dans l'intégrité de chaque sénateur et envers le Sénat;

Autrement dit, le code ordonne presque aux sénateurs de demeurer actifs dans leur communauté. Cependant, pour éviter les conflits d'intérêts, ils doivent déclarer le genre de fonctions qu'ils occupent dans les organismes de charité et les sociétés à but non lucratif, les conseils des universités, les conseils des églises, les conseils professionnels, les conseils à vocation financière et tout autre conseil au sein duquel ils ont des responsabilités, pour que le public connaisse leurs activités. Cela ne veut pas dire qu'un sénateur qui ne déclare aucun rôle au sein de tels conseils serait perçu comme étant non actif. Je ne veux pas insinuer cela du tout.

D'un autre côté, un sénateur qui est actif à ce titre, en raison de son expérience professionnelle, familiale ou personnelle, a le devoir de maintenir ce genre de relation. Malheureusement, dans la version précédente de la Loi sur le Parlement du Canada, l'interprétation donnée aux articles 14 et 15 était trop restrictive pour que nous puissions continuer ce genre de travail. Lorsque j'ai prêté serment comme sénateur, on m'a informé que le poste de membre du conseil d'administration du Centre canadien d'architecture que j'occupais depuis sa fondation entrait en conflit avec mon poste au Sénat. J'ai démissionné du conseil, même si ça me semblait stupide puisque le centre est un organisme public. N'importe qui peut consulter ses dossiers. N'importe qui peut savoir d'où vient l'argent du centre en consultant son rapport annuel. Le centre ne pouvait plus bénéficier de mon dévouement et de mon soutien. J'ai conservé ma ferveur pour le centre, mais j'ai dû en quitter le conseil d'administration. Je pense que c'est dommage, parce que nous avons tous participé à des œuvres de bienfaisance. On nous a demandé d'être présidents d'honneur de diverses campagnes de financement. Après avoir participé à tant d'activités, nous avons été privés de cette participation par l'interprétation donnée aux articles 14 et 15 et l'obligation de demeurer au-dessus de tout soupçon. Ce code résout le problème.

Autrement dit, une fois que les sénateurs auront déclaré quels postes ils occupent à titre personnel, dans des organismes religieux, professionnels, caritatifs, sociaux ou communautaires, le public en sera informé et ils seront invités à poursuivre leurs oeuvres.

Aussitôt que ce code sera adopté, je vais téléphoner au Centre canadien d'architecture pour lui annoncer que je réintègre mon poste au sein de son conseil d'administration, qu'on le veuille ou non.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, j'ai toujours dit, et je le maintiendrai jusqu'à la fin de mes jours, que l'honnêteté ne peut être légiférée. Vous pensez que je suis contre un code d'éthique. Nous avons le Code criminel et à peu près tout ce qu'il faut pour légiférer. Cependant, la vie moderne exige que nous ayons un code tel que celui qui est devant nous. Je continue de croire que l'honnêteté ne peut être légiférée.

Je félicite le sénateur Joyal, qui fait, comme toujours, de remarquables plaidoyers. J'ai siégé avec lui à la Chambre des députés. Il n'a pas changé, il est toujours aussi impeccable dans son approche.

Toutefois, deux ou trois points me fatiguent et je lui en ai fait part hier. Dans les définitions, on définit ce qu'est la famille, ce qu'est un conjoint de fait et ce qu'est un membre de la famille. À l'article 20, aux alinéas 20.1 et 20.2, soudainement, une nouvelle notion nous est lancées « le sénateur peut accepter pour lui même et ses invités », mais il n'y a aucune définition du mot « invité ». C'est le premier point.

Je sais que le sénateur a une réponse. Je voudrais qu'elle soit répétée pour le bénéfice de tous mes collègues.

[Traduction]

Le plus agaçant pour nous, c'est la façon dont c'est écrit. C'est comme si le sénateur McCoy, madame le sénateur Ruth, le sénateur Atkins, le sénateur Doody, le sénateur Murray, le sénateur Pitfield, le sénateur Rivest, le sénateur Dyck, madame le sénateur Plamondon et moi-même n'existions pas. Nous n'existons pas parce que le texte dit que, dans ce comité de cinq membres, deux seront élus au scrutin secret. Je tiens à vous dire que j'ai toujours eu beaucoup de chance dans les scrutins secrets. J'ai été élu président du caucus libéral du Québec sept fois. S'il s'était agi d'un vote à main levée, je n'aurais jamais envisagé de poser ma candidature. J'ai également été élu au scrutin secret contre Sheila Copps. Comme je l'ai dit une fois, je ne conseille pas aux gens de se présenter contre moi. Elle s'était présentée contre moi. Ce fut une incroyable défaite pour mon estimable amie, Mme Copps, dans un scrutin secret.

Maintenant, l'honorable sénateur propose que deux membres soient élus au scrutin secret par le gouvernement, que deux autres soient élus au scrutin secret par l'opposition officielle et que le cinquième soit élu par les quatre autres, après leur élection. Aussitôt que les deux partis auront élu leurs représentants, ils en éliront un autre parmi l'ensemble des sénateurs, qui deviendra le cinquième membre du comité.

Tout d'abord, le Sénat compte 37 femmes. J'espère que certaines d'entre elles trouveront mon argument valable. Je crains fort qu'il n'y ait pas une seule femme dans ce comité.

Le sénateur Stratton : Attendez un instant.

Le sénateur Prud'homme : Chacun a droit à sa propre interprétation. Si vous lisez la version française, vous aurez l'impression qu'il n'y a que des hommes au Sénat. Si vous parcourez la version française de la première à la dernière page, vous pourrez facilement croire que notre institution ne comprend que des hommes.

Je crois que c'est dangereux. Nous avons 11 sénateurs sans affiliation, qui ne font pas partie de l'opposition. Je ne crois pas que le sénateur McCoy, le sénateur Ruth et d'autres soient des sénateurs d'opposition. Nous avons décidé, pour bien des raisons, de siéger à part au Sénat. On n'en a jamais tenu compte. Nous avons 7 vacances et, selon certaines rumeurs, nous aurons un plus grand nombre d'indépendants au Sénat. Je n'aime pas ce comité composé de cinq membres. Je préférerais encore dépendre d'un bon conseiller en éthique. Les honorables sénateurs ont décidé. Je n'irai donc pas plus loin.

Je propose cependant que le cinquième membre du comité soit élu au scrutin secret par l'ensemble du Sénat, de la même façon que le Président est élu à l'autre endroit. Ainsi, les honorables sénateurs sauront qui sont les quatre membres du comité, puis éliront le cinquième parmi l'ensemble des sénateurs. Ils procéderaient par élimination, comme dans le cas du Président de la Chambre des communes. Tout sénateur qui souhaite devenir le cinquième membre ne retirerait pas son nom. Cela signifie que chaque sénateur serait candidat, à moins de retirer son nom. Évidemment, le Président du Sénat retirerait son nom. Bien sûr, les deux élus au scrutin secret se retireraient, de même que les membres représentant l'opposition. Beaucoup de sénateurs retireront leur nom par écrit. Ceux qui resteront à la disposition du Sénat donneront à chacun l'impression d'être égal, l'impression que personne n'est mis à l'écart. Onze d'entre nous s'inclineront gracieusement et diront qu'il y a des limites à leur pouvoir ou à la façon d'être élu. Cela devrait au moins être envisagé avant l'approbation par le Sénat. Je suis inquiet. Il y a quelqu'un de mon côté qui semble trouver mes arguments ennuyeux, mais c'est très important.

(1620)

De plus, j'espère que quelqu'un révisera la version française pour la rendre un peu moins cavalière qu'elle ne l'est en ce moment. À lire le texte français, j'avais l'impression d'être revenu à l'époque de mon arrivée au Sénat, venant de la Chambre des communes, lorsque nous n'avions parmi nous qu'une seule femme sénateur.

La définition de « voyage » est une autre difficulté à laquelle les sénateurs devront s'attaquer. Les honorables sénateurs ont besoin de développer une certaine mémoire institutionnelle. Il y aura des problèmes au sujet de la définition des « associations parlementaires officielles » : officielles mais non financées, officielles mais financées, et non officielles et non financées. J'ai essayé par tous les moyens d'aider le sénateur Furey, à sa demande, comme non-membre du Conseil interparlementaire mixte.

[Français]

Il y a des différences d'opinion sur les définitions. À un moment donné, nous aurons des problèmes. Je trouve bizarre qu'il n'y ait aucune définition — vous êtes un avocat très précis de même que le sénateur Angus et d'autres — dans l'article 20 de ce qu'est « un invité ». C'est un mot qui apparaît soudainement.

Le sénateur Joyal pourrait-il nous donner une suggestion parce qu'à ce moment, je demanderai la tenue d'un vote. Si nous ne sommes que deux, nous serons deux. Au moins, nous serons enregistrés. Les gens nous tomberont dessus. Je ne m'énerve pas avec l'opinion publique. J'essaie plutôt de l'informer.

[Traduction]

L'opinion publique ou ce que les journalistes peuvent dire contre nous ne me rend pas nerveux. Si j'ai l'impression d'avoir fait mon devoir, je peux faire face à la presse ou à quiconque voudrait nous faire mal paraître. Cependant, avant que les sénateurs paraissent mal, j'aimerais m'assurer que nous avons tout tenté.

Je ne suis pas satisfait. Je ne parle pas au nom des onze sénateurs indépendants, mais je parle certainement au nom du sénateur Plamondon, qui m'a autorisé à le faire. Le vote secret crée un malaise. Il est étrange que vous éliminiez dès le départ onze de vos collègues, comme s'ils ne comptaient pas. Le sénateur McCoy et d'autres ne comptent pas. Nous ne serons pas consultés.

Le sénateur Stratton : Vous pourriez être président.

Le sénateur Prud'homme : J'aimerais savoir comment nous serons consultés.

Le sénateur Angus : C'était une longue question.

Le sénateur Joyal : J'aborderai les deux questions soulevées par le sénateur Prud'homme. Tout d'abord, il y a la définition du mot « invité ». Je me reporte à l'article 20 afin que nous sachions tous bien de quoi nous parlons. L'article 20 est intitulé « Déclarations : voyages parrainés ». Nous parlons de voyages.

20(1) Malgré le paragraphe 19(1), le sénateur peut accepter, pour lui-même et ses invités, des offres de voyages parrainés liés à sa charge de sénateur ou découlant de celle-ci.

Il est tout à fait exact, comme l'affirme le sénateur Prud'homme, qu'il n'y a pas de définition du mot « invité ». Dans une telle situation, étant avocat, je me reporte à la Loi d'interprétation. J'ai vérifié dans cette loi et on n'y trouve pas de définition du mot recherché. Bien sûr, la Loi d'interprétation est le dictionnaire que nous utilisons pour interpréter les lois et règlements du Parlement. Si cela ne suffit pas, on se reporte au Oxford English Dictionary, au Larousse ou à un autre dictionnaire. Quelle est la définition du mot « invité » dans un dictionnaire usuel? Je vous la donne de mémoire. Un invité est une personne invitée à qui on offre un service sans frais.

Prenons un exemple. Supposons que j'invite quelqu'un à une partie de hockey. Que se passe-t-il au juste? J'offre à cette personne la possibilité d'assister à une partie de hockey. Évidemment, puisque c'est moi qui invite, c'est moi qui paie son billet. Je pourrais même envoyer un chauffeur prendre mon invité chez lui et l'y ramener après la partie. Je pourrais même offrir un verre au bar à mon invité entre les périodes. Je pourrais aussi lui demander de manger avec moi après la partie. Cette personne est mon invité.

Le sénateur Rompkey : Et plus, on dirait.

Le sénateur Grafstein : Ça me semble intéressant; c'est la meilleure offre qu'on m'ait faite aujourd'hui.

Le sénateur Stratton : N'allez pas plus loin.

Le sénateur Joyal : Je m'arrête ici. Merci, sénateur Stratton. Comme dirait mon père, ça manque de moralité ici.

De quoi s'agit-il, en fait? Il s'agit d'un avantage que nous pouvons offrir, grâce à notre statut, à une autre personne, sans que cette personne ait à payer. En gros, c'est ce que signifie le mot « invité ». Dans cet article, le mot « invité » peut signifier un membre de ma famille. Mon invité pourrait être mon épouse ou ma conjointe de fait, ou mon fils, qui est âgé de plus de 18 ans. Ce pourrait être un de mes enfants âgés de moins de 18 ans. Ce pourrait être mon frère. Ce pourrait être n'importe quel membre de ma famille. Ce pourrait être mon assistant, que je voudrais récompenser pour ses bons services. Ce pourrait être toute personne qui pourrait être intéressée par le sujet de la conférence à laquelle j'ai été invité. Ce pourrait être toute personne que j'aurais invitée à se joindre à moi lors d'un voyage parrainé, dont les coûts sont payés par des fonds privés et non par le gouvernement.

Cet article couvre un grand nombre de personnes. L'article précédent n'aborde que les cadeaux ou avantages qui se limitent aux membres de la famille, et, comme on l'a dit, le mot « famille » est clairement défini dans la liste de définitions du code. Mais la portée de l'article dont il est question est beaucoup plus vaste que celle de l'article précédent.

Nous avons discuté de cette question au comité. Je crois que mesdames les sénateurs Milne et Fraser l'ont soulevée à ce moment- là. Elle a été abordée quand on a parlé du fait d'inviter des amis qui n'ont pas de relations directes avec la famille. Cela arrive. Autrement dit, nous voulions nous assurer que cet article serait efficace. C'est essentiellement pour cette raison que nous avons utilisé le mot « invité ».

Le deuxième point de l'honorable sénateur concerne la façon dont le Sénat, en tant qu'institution, doit choisir le cinquième membre du comité. Le paragraphe 37(4), qui porte sur l'élection des membres, se lit comme suit :

Au début de la session, deux membres du Comité sont élus par scrutin par les sénateurs du caucus du gouvernement et deux membres sont élus par scrutin secret par les sénateurs du caucus de l'opposition; le cinquième membre est élu par une majorité des quatre autres membres après l'élection du dernier de ceux-ci.

Qu'entend-on par majorité des quatre autres membres? On veut dire trois membres. Autrement dit, à elle seule, la majorité du gouvernement ne peut choisir le cinquième membre parce qu'il faut une majorité des quatre. Automatiquement, l'opposition doit participer au choix du cinquième membre parce qu'il faut trois voix. Le gouvernement en a deux. En d'autres mots, le choix du cinquième membre doit faire l'objet d'un consensus entre les deux principaux partis.

Qu'arriverait-il si nous acceptions la proposition du sénateur Prud'homme d'élire ce cinquième membre ici même au Sénat? Il n'est pas certain que le sénateur élu à titre de cinquième membre aurait l'appui de la majorité. Strictement parlant, si on jette un coup d'oeil à la composition actuelle du Sénat, on constate que le gouvernement compte environ 60 sénateurs et que l'opposition en a environ 20. Il est certain que si les sénateurs du parti au pouvoir choisissaient le cinquième membre pour une raison ou pour une autre, nous imposerions le cinquième membre. Voilà qui pose problème pour moi puisque j'estime que le comité doit jouir de la confiance de toutes les parties. Dans notre système, on maintient l'équilibre en donnant voix au chapitre à l'opposition pour le troisième vote. Ainsi nous pouvons garantir que le cinquième membre sera accepté par tous; autrement dit, il s'agirait d'une personne provenant d'un côté ou de l'autre qui serait en mesure d'occuper le poste en faisant abstraction de son allégeance.

(1630)

Le sénateur a soulevé une question fort importante. Nous avons débattu la question et nous nous inquiétions du fait que, une fois le cinquième membre choisi, le gouvernement serait majoritaire au comité. Nous souhaitions maintenir l'équilibre entre les parties. La proposition n'est peut-être pas parfaite, mais elle garantit que le cinquième membre du comité est acceptable aux deux côtés du Sénat.

Le paragraphe 37(4) précise que le cinquième membre doit être élu par la majorité des quatre autres membres après l'élection du dernier d'entre eux. Cette disposition vise à maintenir l'équilibre.

Son Honneur le Président : Simplement à titre d'observation, honorables sénateurs, je signale que les règles prévoient des observations et des questions. La dernière observation sous la rubrique des observations et questions a duré environ 20 minutes, ce qui dépasse la durée d'intervention normale.

Le sénateur Prud'homme : Je suis tout à fait en désaccord avec l'interprétation de notre estimé collègue, le sénateur Joyal, concernant l'élection du cinquième membre. Cela laisserait les 11 sénateurs indépendants à la merci des quatre premiers membres du comité. Il n'y a pas de possibilité pour un sénateur indépendant de représenter les autres sénateurs indépendants. J'aimerais être en mesure d'en recommander un des 11, ce qui ne veut pas dire qu'il serait élu. Voilà qui nous met les 11 à la merci des quatre qui vont être élus par vote secret, probablement après avoir fait campagne ou avoir été choisis ou approchés par leur propre parti.

Les sénateurs sont tous égaux ou ils ne le sont pas. Il se peut que j'aie tort, mais voilà la beauté du débat.

[Français]

Cela marque une certaine inégalité entre les sénateurs. Je m'exprimerai clairement sur cette question demain.

[Traduction]

L'honorable John G. Bryden : Honorables sénateurs, je tiens à dire à tous ceux qui ont participé à ce long processus, en particulier les membres du Comité du Règlement, que ce dossier a beaucoup progressé, et que je serai heureux d'appuyer cette proposition.

Si nous attendions pour obtenir le parfait libellé, nous n'atteindrions probablement jamais notre objectif. Cependant, un mécanisme d'examen est intégré au processus et les sénateurs devront exiger cet examen au moment opportun.

Pour revenir à la préoccupation exprimée par le sénateur Angus, je dirai que la nouvelle loi et cet ensemble de règles signifient que nous passons de ce qui était, au moment où beaucoup d'entre nous se sont joints à cette institution, un système basé sur l'honneur pour régir la conduite des sénateurs, à un système basé sur des règles. Il y a toutes sortes de raisons pour justifier un tel changement, la moindre n'étant pas que les médias et le public l'exigent.

En élisant parmi tous les sénateurs quatre membres du comité qui superviseront en grande partie ce système, et en demandant à ces membres, ou peut-être même à l'ensemble du Sénat, de choisir le cinquième membre, et en laissant au comité la décision finale d'enquêter sur les sénateurs ou sur leurs activités, je pense que nous préservons au moins un vestige du système d'honneur que nous avions auparavant. En choisissant les plus honorables et les plus compétents d'entre nous, nous finirons par avoir le meilleur des deux mondes.

Je partage certaines des préoccupations du sénateur Angus, si je les ai bien interprétées, en ce qui concerne les relations entre le conseiller sénatorial en éthique et le comité. Il est clair que le comité tranche les questions et en fait rapport au Sénat. Si le conseiller sénatorial en éthique mène une enquête et se sent obligé d'attirer l'attention du public sur la question même si le comité ou le Sénat ne sont pas d'accord, y a-t-il des règles qui l'empêcheraient de le faire? N'est-il pas possible d'empêcher un conseiller corrompu de faire ce qu'il a décidé de faire, mais qui donc est en position de sanctionner un conseiller sénatorial en éthique qui passe outre à son mandat?

Nous ne pouvons pas le congédier parce que nous ne l'avons pas engagé. Nous ne pouvons pas le suspendre parce qu'il n'est pas notre employé.

Tous les fonctionnaires du Parlement sont censés êtres des serviteurs du Parlement. Or, dans bien des cas, des gens plus sages que moi ont dit croire que le Parlement avait fini par être pratiquement le serviteur de ses fonctionnaires ou contrôlé par eux.

(1640)

Le sénateur Joyal : En examinant cette importante question, je me suis demandé quelle était notre relation avec le conseiller sénatorial en éthique par rapport à notre relation avec tous les autres fonctionnaires du Parlement; c'est-à-dire, le vérificateur général, le commissaire aux langues officielles, le commissaire à la protection de la vie privée, le commissaire à l'information et le directeur général des élections. J'ai conclu que le Sénat dispose d'une plus grande capacité pour gérer les initiatives du conseiller sénatorial en éthique que pour gérer celles de tout autre fonctionnaire du Parlement. Pour répondre à la question de l'honorable sénateur, voici ce que dit l'article 46 du projet de code :

(1) Le comité examine le rapport présenté par le conseiller sénatorial en éthique conformément à l'article 45, aussi rapidement que les circonstances le permettent.

(2) Le comité remet sans délai une copie du rapport du conseiller sénatorial en éthique au sénateur qui a fait l'objet de l'enquête et lui donne la possibilité de se faire entendre par le comité.

La prochaine rubrique est « Enquête » et elle énonce la responsabilité du comité :

(3) Lors de l'examen du rapport, le comité peut :

(a) soit mener une enquête;

(b) soit ordonner que l'enquête du conseiller sénatorial en éthique soit poursuivie et renvoyer le rapport à celui- ci pour qu'il y ajoute les renseignements supplémentaires spécifiés par le comité.

Enfin, au terme de son examen du rapport du conseiller sénatorial en éthique selon cet article, le comité fait rapport au Sénat. En d'autres mots, le projet de code énonce clairement que le comité doit examiner le rapport du conseiller sénatorial en éthique. C'est assez clairement dit dans le projet de code.

Toutefois, la question de l'honorable sénateur va plus loin. Il se demande ce qui arriverait en cas de conflit majeur entre le conseiller sénatorial en éthique et le comité. À mon avis, l'article 4 et l'article général relatif au comité répondent à la question : le conseiller sénatorial en éthique est placé sous l'autorité générale du comité. C'est ce que le projet de loi prévoit. Le paragraphe 20.5(1) proposé est la mesure habilitante; il stipule que le conseiller s'acquitte des fonctions qui lui sont conférées par le Sénat en vue de régir la conduite des sénateurs.

Il est clair que la décision revient au comité et au Sénat. En ce qui concerne les conflits, je vous renvois au projet de loi. Le paragraphe 20.2(1) de la loi précise :

Sauf révocation motivée par le gouverneur en conseil sur adresse du Sénat, le conseiller exerce ses fonctions à titre inamovible pour un mandat de sept ans.

Autrement dit, en cas de conflit grave entre les deux, le Sénat aurait la possibilité de transmettre une adresse à la gouverneure générale pour que le conseiller sénatorial en éthique soit démis de ses fonctions.

Il existe un lien symbolique entre le projet de code et la loi. Votre question peut sembler théorique, mais il y a eu, dans les Territoires du Nord-Ouest je crois, un cas où un conflit entre le conseiller en éthique et l'assemblée législative a été soumis aux tribunaux qui ont tranché.

Autrement dit, ce n'est pas complètement théorique, mais le système nous permet d'éviter d'avoir recours aux tribunaux. Comme je l'ai dit, ce serait une erreur de notre part de ne pas résoudre le problème au sein de notre institution parlementaire et de faire appel aux tribunaux. Les fonctions disciplinaires font partie des droits et des responsabilités du Parlement. Le conseiller en éthique peut aussi, bien sûr, remettre sa démission.

L'honorable Francis William Mahovlich : Duff Conacher est le coordonnateur de l'organisme connu sous le nom de Démocratie en surveillance, qui surveille ce qui se passe à la Chambre des communes, au Sénat et au Parlement en général. Je ne sais trop comment cet organisme est financé, mais je sais que cela prête à controverse et il pourrait y avoir conflit d'intérêts, mais je n'en suis pas vraiment certain.

M. Conacher a émis l'opinion que le régime d'éthique est une farce. Est-ce que Démocratie en surveillance a fait des recommandations à notre comité?

Le sénateur Joyal : C'est peut-être au sénateur Smith qu'il appartient de répondre, parce qu'il présidait le comité. Je le rappelle, j'ai assisté à toutes les réunions du comité et je n'ai jamais entendu Duff Conacher témoigner à propos du projet de code en sa qualité de représentant de Démocratie en surveillance. Les opinions de Démocratie en surveillance sont bien connues. J'ai cité tout à l'heure un article paru dans l'Ottawa Citizen. Cette organisation se donne pour mission de discréditer le Parlement et les parlementaires. Elle a droit à son opinion et à la liberté d'expression, mais nous avons également droit à nos réputations, comme je l'ai dit plus tôt.

La protection de la vie privée demeure pour nous un droit. Si notre réputation est en cause, nous avons les moyens de la défendre. C'est pourquoi j'ai soulevé tout à l'heure la question du soutien financier. Lorsque nous établissons un système, celui-ci doit être équilibré. La justice ne saurait être tributaire, pour l'essentiel, des moyens d'une personne, et j'ai vu de nombreux cas, par le passé, qui touchaient des sénateurs des deux côtés. Je me souviens de la situation de l'ancien sénateur Ghitter, qui a intenté des poursuites et a eu gain de cause. Personnellement, j'ai intenté des poursuites et j'ai obtenu un règlement équitable.

D'autres sénateurs ont engagé des poursuites et leur cause est toujours en instance devant les tribunaux. Je le répète, Démocratie en surveillance a droit à son opinion. Elle jettera le discrédit sur la Chambre des communes autant que sur le Sénat. Tous les citoyens canadiens ont droit à leur opinion, mais lorsqu'ils exercent ainsi leur liberté d'expression, nous ne devrions pas renoncer, à mon avis, à notre droit à un traitement équitable. C'est pourquoi j'estime que ce système nous offre un traitement équitable.

Le sénateur Mahovlich : Je vous remercie, sénateur.

Le sénateur Angus : Bonne question, bonne réponse.

L'honorable Joan Fraser : Comme je l'ai dit, ma question fait suite à celle du sénateur Bryden. Si je l'ai bien compris, il s'inquiétait de ce qui se produirait si un conseiller sénatorial en éthique se sentait obligé, pour quelque raison que ce soit, de rendre publiques des questions qui devraient demeurer confidentielles.

Le sénateur Joyal convient-il avec moi que nous avons, en fait, une ceinture et des bretelles dans le cas qui nous occupe? Nous avons non seulement la disposition générale qui figure dans la Loi sur le Parlement du Canada, mais également une autre référence à cela dans le code. Malheureusement, la version du code que j'ai en main est l'avant-dernière, de sorte que mes paragraphes ne sont pas numérotés exactement de la même manière. Il s'agit du troisième avant-dernier article du code, qui dit en partie :

... Le conseiller sénatorial en éthique est tenu d'assurer la confidentialité de toute question que le présent code exige de garder confidentielle. L'omission de le faire constitue un comportement pouvant justifier l'une ou l'autre — ou les deux — mesures disciplinaires suivantes :

a) une résolution adoptée par le Sénat [...] afin de demander au gouverneur-en-conseil la révocation du conseiller sénatorial en éthique.

Est-ce que cela ne règle pas clairement la question?

Le sénateur Joyal : Exactement, sénateur Fraser; je serais tenté de parler non seulement de la ceinture et des bretelles, mais des boutons aussi. L'intérieur des vêtements pour hommes comporte un bouton qui permet de s'assurer que la chemise est bien attachée au pantalon.

Comme je le disais plus tôt, la question de la confidentialité est d'une importance majeure. Elle a préoccupé de nombreux sénateurs. La confidentialité est à la base même de la confiance que nous aurons envers le conseiller sénatorial en éthique. Si nous entrons dans le bureau du conseiller sénatorial en éthique ou si nous remplissons notre formulaire au mieux de notre connaissance, comme le disait le sénateur Bryden, selon l'honneur et en toute bonne foi, et que nous soupçonnons le moindrement que le conseiller sénatorial en éthique communiquera le contenu du document aux médias, qui sera alors débattu sur la place publique, aucun des membres du comité n'aurait approuvé cela et n'aurait considéré le système comme équitable.

(1650)

C'est pourquoi la disposition que vient de citer madame le sénateur Fraser lie le code à la loi en faisant clairement mention de la loi dans les règles. De plus, dans la version originale dont madame le sénateur Fraser se souviendra très bien, nous avons assujetti non seulement le conseiller sénatorial en éthique mais aussi son personnel à l'obligation de confidentialité. Ne nous leurrons pas.

Nous vivons à l'ère de l'informatique. Supposons que le bureau du conseiller sénatorial en éthique ait un disque comportant de l'information sur nous et que quelqu'un s'introduise par effraction dans le système. Que devient la confidentialité? Afin d'éviter que le conseiller sénatorial en éthique puisse se défiler et imputer la responsabilité de cet acte à l'un de ses collaborateurs, ou affirmer que ce dernier n'a pas respecté ses instructions, nous avons ajouté au code des dispositions qui obligent non seulement le conseiller sénatorial en éthique mais également les membres de son personnel et les sous-traitants du conseiller sénatorial en éthique à l'obligation de confidentialité. Comme vous le savez, et vous l'avez observé dans l'autre endroit, des marchés seront passés et c'est pourquoi toutes ces personnes seront assujetties à la même obligation de confidentialité, de manière à éviter le genre de situation dont nous venons de parler et à préserver la confiance envers le système.

L'honorable Tommy Banks : Parlant de déclarations, sénateurs, mon épouse est agent de théâtre et représente environ 250 artistes de spectacle. Il lui arrive parfois de signer en leur nom des contrats avec divers organismes du gouvernement du Canada.

Or, l'une des dispositions du code à l'étude nous oblige à déclarer ce type d'opérations, pourvu que l'on déploie des efforts raisonnables pour déterminer les renseignements. C'est la formulation utilisée. J'ai donc déployé des efforts raisonnables. Je ne vous ferai pas part de la réponse que j'ai obtenue, car je serais expulsé de mon siège, si je le faisais. Je vais faire des efforts supplémentaires, non sans risque pour ma personne.

Le sénateur Day : Cela me paraît raisonnable.

Le sénateur Joyal : Quel est son nom?

(Sur la motion du sénateur Angus, le débat est ajourné.)

LE SÉNAT

MOTION VISANT À MODIFIER L'ARTICLE 32 DU RÈGLEMENT—LES INTERVENTIONS AU SÉNAT—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Corbin, appuyée par l'honorable sénateur Cook :

Que le Règlement du Sénat soit modifié à l'article 32 par substitution de ce qui suit :

« 32. (1) Un sénateur qui désire prendre la parole au Sénat doit se lever du siège qu'il occupe habituellement avant de s'adresser aux autres sénateurs.

(2) Tout sénateur qui prend la parole au Sénat doit s'adresser dans l'une des langues officielles.

(3) Nonobstant le paragraphe (2), un sénateur qui désire s'adresser à la Chambre en inuktitut doit en aviser le greffier du Sénat au moins quatre heures avant le début de la séance du Sénat.

(4) Le greffier du Sénat prend les dispositions nécessaires afin d'obtenir l'interprétation des paroles prononcées en inuktitut dans les deux langues officielles.

(5) Les paroles prononcées en inuktitut seront publiées dans les Débats du Sénat dans les deux langues officielles, avec mention dans les Journaux du Sénat qu'elles ont été prononcées en inuktitut. »—(L'honorable sénateur Stratton)

L'honorable Terry Stratton (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, j'avais proposé l'ajournement du débat sur cette motion afin de sonder notre caucus pour déterminer si certains sénateurs souhaitaient prendre la parole relativement à cette question. En ce qui nous concerne, de notre côté, nous sommes très heureux de voir cette motion renvoyée à un comité.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, êtes-vous prêts à vous prononcer?

Des voix : Le vote!

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Je me demande s'il serait possible de préciser ici que l'on veut transmettre l'objet de la motion au comité avant la tenue d'un vote à l'étape de la deuxième lecture. Si l'on est d'accord sur ce point, je suis prêt à proposer l'adoption de cette motion.

Le sénateur Stratton : Ce n'est pas un projet de loi.

Son Honneur le Président : Ce n'est pas ce dont nous discutons.

L'honorable Eymard G. Corbin : L'objet n'est-il pas la motion elle- même?

Le sénateur Stratton : C'est la motion elle-même. Ce n'est pas un projet de loi.

Son Honneur le Président : Sénateur Rompkey, le libellé de la motion même répond-il à votre préoccupation?

Le sénateur Rompkey : Oui.

Son Honneur le Président : L'honorable sénateur Corbin prpose, avec l'appui de l'honorable sénateur Cook, que le Règlement du Sénat soit modifié en remplaçant l'article 32 par ce qui suit :

Puis-je m'abstenir de lire la modification proposée?

Le sénateur Stratton : On ne va pas adopter la motion. On va l'envoyer au comité.

Le sénateur Robichaud : C'est ce que nous sommes en train de faire.

Le sénateur Stratton : Excusez-moi. Comme je l'ai dit, nous, de ce côté-ci, sommes très heureux de voir cette motion renvoyée au comité aux fins d'examen.

Le sénateur Robichaud : Proposez l'adoption de la motion.

Le sénateur Stratton : Je pense que c'est le motionnaire, c'est-à-dire le sénateur Corbin, qui devrait le faire.

RENVOI AU COMITÉ

L'honorable Eymard G. Corbin : Je propose que la motion ne soit pas adoptée maintenant, mais qu'elle soit renvoyée au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

[Français]

LA QUESTION ISRAÉLO-PALESTINIENNE

INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Prud'homme, C.P., attirant l'attention du Sénat sur la question israélo-palestinienne et la responsabilité du Canada.—(L'honorable sénateur Prud'homme, C.P.)

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, comme on ne sait jamais ce que l'avenir nous réserve et que nous en sommes à la quatorzième journée de cette interpellation inscrite à l'ordre du jour, j'aurais peur, si j'étais absent demain, que ce débat soit terminé.

Il y a des développements extraordinaires au Moyen-Orient, certains que nous aimons et d'autres non. Je ne voudrais surtout pas être tenu responsable de certains propos et de faire l'historique de ce qui m'amène à cette interpellation. Ce pourrait être fort désagréable à entendre pour certains.

Avec votre permission, et bien conseillé j'espère, je demande que le débat soit reporté.

[Traduction]

Je propose que cet article soit reporté à mon nom pour le reste de mon temps de parole.

Son Honneur le Président : L'honorable sénateur Prud'homme, avec l'appui de l'honorable sénateur Fraser, propose que le débat soit ajourné à demain pour le temps de parole qu'il reste au sénateur Prud'homme. Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 18 mai 2005, à 13 h 30.)


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